Algérie : Signes d’un État en faillite malgré sa richesse

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Dr. Mohamed Mliless

Le Dr Mohamed Mliless est un chercheur indépendant en écolinguistique et en analyse critique des discours environnementaux et politiques. Il est titulaire d’un doctorat en linguistique appliquée de l’Université Moulay Ismail de Meknès, au Maroc.

L’Algérie, un pays d’Afrique du Nord, est actuellement confrontée à une situation complexe et multifacette. Sur le plan politique, le pays connaît des changements et des transformations significatifs. Le mouvement Hirak de 2019 a conduit à la démission de l’ancien président Abdelaziz Bouteflika, mais depuis lors, les réformes politiques et les efforts visant à établir un système politique plus inclusif ont été retardés. Cette instabilité politique se reflète dans le paysage socio-économique du pays, où des problèmes tels que le chômage et l’accès limité aux services publics essentiels persistent. En ce qui concerne la gouvernance, des tentatives hésitantes ont été faites pour renforcer les institutions démocratiques et accroître les normes de transparence. L’économie de l’Algérie dépend fortement des exportations d’hydrocarbures, la rendant vulnérable aux fluctuations des prix mondiaux du pétrole. Cette fragilité économique, combinée à un manque de vision stratégique et à des défis de gouvernance, aggrave la susceptibilité du pays à la volatilité.

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Selon un rapport de la Brookings Institution, la fragilité, en tant que tribut de l’échec, est décrite comme un syndrome caractérisé par l’insécurité, le manque de légitimité et de capacité de l’État, des identités fracturées, des entreprises formelles limitées et une susceptibilité aux chocs. Ces caractéristiques se renforcent mutuellement, créant un piège qui remet en question les diagnostics conventionnels d’une « cause profonde » et les « solutions » conventionnelles telles que l’établissement d’une société de style OCDE. L’instabilité politique, en particulier lorsqu’elle est violente, peut avoir un impact négatif sur la productivité économique et les capacités transactionnelles, réduisant les investissements et la croissance économique future et créant un environnement socio-politique fragile. Le Conseil des relations étrangères signale que l’instabilité, pour des raisons politiques, a augmenté en Algérie depuis le début de l’année 2019 en raison d’une transition de leadership ratée et d’une stagnation économique en cours, ce qui pourrait entraîner davantage d’instabilité alors que des leaders militaires et politiques ont été fréquemment emprisonnés, révoqués et remplacés.

Fragilité économique due à un manque de vision

L’absence d’une vision économique claire a des conséquences négatives pour la stabilité et la croissance d’un pays. Une vision bien définie fournit une direction et une stabilité, tandis que la vulnérabilité financière augmente la sensibilité aux chocs. L’économie algérienne, qui repose fortement sur les revenus pétroliers, traverse actuellement une crise en raison de sa dépendance aux hydrocarbures. Selon Pierre Desorgues, les prix du pétrole ont soutenu l’économie pendant l’ère Bouteflika, mais ont depuis diminué, entraînant une réduction de moitié des revenus pétroliers annuels au cours des cinq dernières années.

La dépendance de l’Algérie vis-à-vis des hydrocarbures révèle la fragilité économique de son système politique. Cette dépendance entrave le développement d’autres secteurs et peut amener le pays à lutter pour rester compétitif à long terme. Selon l’ancien ministre des Finances Abdellatif Benachenhou, d’ici 2030, la production d’hydrocarbures sera largement absorbée par la demande locale, ce qui suggère que l’Algérie pourrait être confrontée à des défis pour maintenir ses revenus d’exportation de pétrole et de gaz. Cette observation est partagée par l’ancien PDG de Sonatrach, Abdelmadjid Attar.

Un manque de vision économique entraîne des résultats suboptimaux tels qu’une croissance lente et un chômage élevé. Selon un rapport du North Africa Post, la politique économique de l’Algérie, qui dépend fortement des revenus pétroliers, a un impact négatif sur sa compétitivité. L’absence d’une vision claire a conduit à des mesures temporaires telles que les interdictions d’importation, ce qui a entraîné des pénuries pour les entreprises locales. D’autres indicateurs de fragilité économique comprennent la dépendance aux importations et aux subventions, le découragement de l’investissement étranger en raison de la bureaucratie et de la corruption, ainsi qu’un système bancaire sous-développé. La loi des 51/49%, qui limite la propriété étrangère des entreprises algériennes à 49%, entrave également l’investissement étranger.

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Actuellement dirigée par un président nommé par l’armée, l’Algérie connaît un déclin en raison de l’échec des stratégies économiques nationales. Aujourd’hui, le pays fait face à de nombreux défis tels que le maintien de la paix sociale, la réduction des subventions et la diversification de son économie. Cependant, le gouvernement a tardé à mettre en œuvre des réformes pour résoudre sa dépendance au pétrole et au gaz. Un manque de vision économique peut avoir des conséquences graves pour l’Algérie, notamment une dette croissante et une marginalisation des exportations. De plus, des systèmes économiques et sociaux qui accroissent les inégalités exacerbent la polarisation de la société. Pour créer un avenir durable, le gouvernement algérien doit relever ces défis en mettant l’accent sur la réduction des inégalités et la promotion de la prospérité partagée.

L’absence d’une gouvernance efficace peut avoir des conséquences graves pour la stabilité, la sécurité et le développement économique d’un pays. Sans des institutions solides et un leadership responsable, le manque de gouvernance peut conduire à la corruption, aux troubles sociaux et à la réduction des investissements. Une crise sanitaire sans précédent peut également avoir des conséquences économiques et sociales potentiellement extrêmes qui pourraient inverser des décennies de progrès en matière de développement.

L’état de la gouvernance en Algérie est évalué selon les indicateurs mondiaux de gouvernance de la Banque mondiale (WGI), qui propose six dimensions de gouvernance : « Voix et responsabilité », « Stabilité politique », « Efficacité du gouvernement », « Qualité de la réglementation », « État de droit » et « Contrôle de la corruption ».

Le risque d’instabilité politique a augmenté depuis le début de l’année 2019, lorsque l’ancien président a annoncé sa décision de briguer un cinquième mandat lors des élections. Pour l’Institut de Washington, la crise politique en cours en Algérie se caractérise par un système politique divisé. En termes de « Violence et terrorisme », l’indice de terrorisme en Algérie s’élevait à 4,43 points, ce qui indique une possible résurgence de l’activité djihadiste. La diminution de la violence et des menaces terroristes peut avoir un impact significatif sur la stabilité et la gouvernance du pays.

« L’efficacité du gouvernement » a un impact significatif sur la stabilité et la gouvernance d’un pays. Le Conseil des relations étrangères affirme que le risque d’instabilité politique en Algérie est fortement ressenti en raison d’une transition de leadership ratée et d’une stagnation économique continue.

De même, l’Institut de Washington aborde les défis auxquels est confronté le système politique divisé de l’Algérie. Par exemple, Freedom House mentionne que « l’État de droit » et « le contrôle de la corruption » sont des aspects importants d’une gouvernance faible. Des lois anti-corruption insuffisantes, un manque de transparence officielle et des bureaucraties gonflées contribuent à la corruption généralisée. La faiblesse de l’État de droit et la corruption généralisée peuvent compromettre la capacité du gouvernement à mettre en œuvre efficacement des politiques et à fournir des services essentiels. Il est crucial que le gouvernement prenne des mesures pour renforcer l’État de droit et lutter contre la corruption afin d’assurer la stabilité et le développement à long terme du pays.

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Conclusion

Au vu de sa fragilité économique, de l’absence de vision économique et de l’inefficacité de la gouvernance, l’Algérie peut être considérée comme un État en voie d’échec. La combinaison de ces facteurs a entraîné une économie fragile qui est incapable de résister aux chocs externes et qui manque d’une orientation claire pour une croissance future. De plus, l’absence de gouvernance efficace a entravé la capacité de l’État à faire face à ces problèmes et à mettre en œuvre les réformes nécessaires. Si cette situation persiste, le pays peut devenir un fardeau pour le développement de la région. Sa vulnérabilité peut favoriser des soulèvements internes et le rendre susceptible de tomber entre les mains de fanatiques, qu’ils soient militaires ou extrémistes. En conséquence, il sera crucial de relever ces défis pour assurer la stabilité et la prospérité futures de l’Algérie.

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