Au Maroc, un coup de crayon vaut encore la prison

Sept ans après, rien n’a changé. Taoufik Bouachrine et Hamid El Mahdaoui, entre autres, se trouvent en prison. Ali Anouzla a dû faire recours à l’auto-censure. 

Backchich, 26 mai 2012

L’ancien dessinateur de Bakchich Khalid Gueddar a été de nouveau arrêté samedi matin au Maroc. Il attend son jugement pour ce dimanche.

Sa très précieuse et grâcieuse Majesté Mohammed VI a été le premier chef d’Etat reçu à l’Elysée par le nouvel occupant des lieux François Hollande. Une visite privée ce week end à Paris, assortie d’une rencontre informelle. A cette occasion, il n’est pas sûr que les discussions se soient trop apesanties sur la démocratie marocaine. Pourtant, la défense des libertés demeure un combat quotidien dans le royaume chérifien. En particulier la liberté d’expression.

Bakchich a eu à en faire l’amère expérience, quand Khalid Gueddar, l’un de nos dessinateurs, a été enfermé au Maroc puis jugé et condamner à 3 ans de prison avec sursis et 270 000 euros d’amende en 2009.

Etait alors officiellement reprochés à Khalid d’oser caricaturer les membres de la famille royale, dont le roi, commandeur des croyants. La bande dessinée Mohammed VI, le roi qui ne voulait plus être roi, a également beaucoup agacer le Makhzen.

Malgré l’acharnement judiciaire, Khalid n’a jamais renoncé à son art, ni au journaliste, qu’il exerce dans divers journaux marocains depuis 2011.

Et le 26 mai au matin, notre ami a été arreté dans le Nord du pays à Kenitra, a révélé son confrère de plume Ali Lmrabet, qui a aussi eu à connaître les geoles marocaines pour ses dessins et enquêtes.

Le motif de son embastillement? Ebriété publique. «Une vieille technique marocaine. Autoriser les boites de nuit, mais arrêter à la sortie les joyeux fétards qui s’y rendent, surtout ceux qu’on tient à l’oeil» décrit Lmrabet. «Ebriété politique serait plus adapté», a pesté Catherine Graciet, spécialiste du Maroc, ancienne de Bakchich et auteure, entre autre du Roi Prédateur. .

Enfermé depuis samedi 26 mai, 5 heures, Khalid doit être présenté dimanche 27 mai au procureur. Joint ce matin par Bakchich, il conteste les motifs de son incarcération. «On nous a arrêté avec un ami en sortant d’une boîte de nuit le Jakarata, qui est dans l’hôtel le Saphir. Mais je n’avais pas bu d’alcool. Au commissariat j’ai du attendre des heures avant de savoir ce que je faisais là. Notre PV d’interrogatoire était quasiment prêt quand on nous a interrogé. Et depuis on attend. On ne sait pas quand on va passer en jugement.» Avec à la clé, une possible révocation du sursis de sa peine de 3 ans d’emprisonnement. Pour des coups de crayons. Pour un peu de liberté d’expression.

Dans trois jours, Khalid doit lancer un site web satirique au Maroc, www.baboubi.com

Au royaume enchanté, le changement c’est pas maintenant…

Papier actualisé dimanche 27 mai à 13 heures après avoir réussi à joindre Khalid Gueddar

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