Le Maroc doit respecter la souveraineté du Sahara occidental pour adhérer l’Union Africaine

L’ambassadeur du Kenya à Alger, Moi Lemoshira, a déclaré, jeudi dernier, lors d’une rencontre avec la presse, que «les pays désirant adhérer à l’Union africaine (UA) doivent se conformer à l’Acte constitutif de l’organisation et respecter la souveraineté des Etats membres». Avec des propos clairs, l’ambassadeur a ajouté que son pays «se conforme à l’Acte constitutif de l’UA et nous soutenons tout appel au respect de cet acte pour tout pays désirant rejoindre l’organisation panafricaine et nous adhérons entièrement à ce processus». 
Evoquant par là la demande d’adhésion du Maroc à l’Union africain, M. Lemoshira a affirmé que le Kenya «n’a aucune objection concernant l’adhésion d’un pays à l’UA. Le Maroc a demandé de rejoindre l’Union africaine, un processus qui doit se faire dans l’adhésion totale à l’Acte constitutif de l’UA et ce dans le cadre du respect de la souveraineté des Etats membres». «Dans l’Union africaine, il n’y a pas de petits pays ou de grands pays, de nouveaux ou d’anciens Etats, car la souveraineté des Etats doit êtres respectée» et «nous sommes un pays qui milite pour la liberté en soutenant les pays membres», a-t-il dit. 
Autrement dit, le Maroc doit respecter «la souveraineté» du Sahara occidental. Et à propos justement du conflit au Sahara occidental occupé, l’ambassadeur kenyan a rappelé les déclarations de l’UA et les résolutions pertinentes des Nations unies depuis 1975 appelant à la tenue d’un référendum d’autodétermination dans ce territoire occupé par le Maroc. Il a souligné à ce propos que la République arabe sahraouie démocratique (Rasd) est «un membre à part entière de l’Union africaine qui est un ensemble regroupant en son sein des pays souverains, indépendants et égaux».
«Le Kenya est très honoré que la décision pour les Sahraouis de devenir membres de l’UA ait été prise dans notre pays», a-t-il dit. Il a réitéré dans ce cadre le soutien de son pays à la cause sahraouie, «un engagement qui ne peut être remis en cause». Lors d’une visite début décembre dernier dans les camps de réfugiés sahraouis, la ministre des Affaires étrangères kenyane, Amina Mohamed, avait réaffirmé le soutien de son pays à la cause sahraouie, appelant à accélérer l’organisation d’un référendum d’autodétermination pour le peuple sahraoui. 
Force est de constater que le soutien affichait à la cause sahraouie par le Kenya intervient à une dizaine de jours de la tenue du 28e sommet de la Commission de l’Union Africaine, prévu les 30 et 31 janvier à Addis Abeba en Ethiopie. Cette édition sera marquée par l’élection du nouveau président de cette Commission, qui succèdera à l’ancienne ministre des Affaires étrangères de l’Afrique du Sud, Nkosazana Dlamini Zuma, mais aussi, comme l’espère le Maroc, par la soumission de la demande d’adhésion marocaine à la conférence des chefs d’Etat. A ce propos, il y a lieu de rappeler que le Maroc s’est engagé dans une course contre la montre pour finaliser la procédure de sa demande d’adhésion à l’UA. 
Le Royaume a formulé en septembre dernier une demande d’adhésion à l’UA. Son Conseil des ministres, présidé par le Roi Mohammed VI a adopté, le 10 janvier dernier, la loi relative à l’Acte constitutif de l’UA ainsi que le projet de loi portant approbation de la loi précitée. Une semaine après, à savoir mercredi dernier, la plénière de la Chambre des représentants a adopté l’Acte constitutif de l’UA, suivie le lendemain par la chambre des conseillers. Selon le ministre marocain des Affaires étrangères, Salaheddine Mezouar, l’examen de la Charte de l’UA par les deux Chambres du Parlement est destiné à ôter toutes excuses juridiques visant «à retarder à 2018 l’admission du royaume». 
Selon les déclarations de Mezouar, «sur les 54 Etats de l’Union africaine, 40 se sont prononcés en faveur de l’adhésion du Maroc à l’organisation continentale (…) Cet appui sans réserves est un signal fort adressé à l’ensemble de l’Afrique sur l’engagement de toutes les composantes politiques à appuyer la politique africaine du royaume». Mais si le chef de la diplomatie marocaine évoque la politique africaine du Royaume comme raison du retour du Maroc à l’UA, son chef du gouvernement est plus directe en évoquant «la défense de l’intégrité territoriale». Clairement, Abdelilah Benkirane a dit, dans un entretien au site le360.ma, réputé proche du palais royal, qu’«il s’agit de l’intérêt suprême de l’État lié à notre adhésion à l’Union africaine qui nous permettra de défendre notre unité territoriale». 
Avant lui, Mohammed VI avait affirmait que l’adhésion de son pays à l’Union africaine lui permettra de défendre ses «droits légitimes et de corriger les contre-vérités colportées par les adversaires» de son «intégrité territoriale, notamment au sein de l’Organisation africaine». Ces déclarations viennent appuyer les craintes de certains pays africains, dont l’Algérie, de voir l’UA se transformer en terrain de bataille autour du conflit au Sahara occidental. Il semble clairement que la signature de l’Acte constitutif de l’UA par le Maroc ne constitue qu’une formalité. Il faut rappeler que le Maroc s’est retiré du Sommet afro-arabe, qui s’est déroulé en novembre dernier en Guinée équatoriale, en signe de protestation contre la présence d’une délégation sahraouie. La Rasd avait accepté d’assister à cette rencontre, où elle n’avait pas coutume de figurer, sur demande de l’UA qui voulait, par cette inscription d’une délégation sahraouie au Sommet, faire un test pour s’assurer des intentions marocaines. Ces dernières semblent claires après le retrait : la demande d’intégration n’est, en fait, qu’un subterfuge destiné à phagocyter l’organisation en la divisant sur le principe de soutien à l’autodétermination du Sahara occidental. 
En ratifiant l’Acte constitutif de l’UA, le Maroc a choisi de siéger aux côtés de la Rasd et de reconnaitre, logiquement, sa souveraineté comme étant un Etat membre au sein de cette organisation panafricaine. En agissant de la sorte le Maroc ne devrait, en aucune façon, mettre à l’avant sa revendication territoriale sur le Sahara occidental au sein de cette organisation, encore moins exclure la Rasd de celle-ci. Car, aux termes de l’article 4 (b) de l’Acte constitutif, l’Union africaine est fondée conformément aux principes du respect des frontières existantes au moment de l’accession à l’indépendance. Or, lors de l’indépendance du Maroc en 1956 le Sahara occidental n’en faisait pas partie, tout comme il ne l’a jamais été!

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