Rahabi dissèque l’état des relations algéro-espagnoles deux ans après le revirement de Sanchez sur le Sahara Occidental

Rahabi pense qu’un retour de l’Espagne à sa position neutre adoptée depuis le début du conflit du Sahara occidental est primordial pour un retour à la normale avec l’Algérie

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PAR ZINE HADDADI

Alors que la brouille diplomatique entre l’Algérie et l’Espagne causée par l’alignement de Madrid sur la proposition marocaine d’autonomie concernant le Sahara occidental est arrivée à son deuxième anniversaire, très peu d’avancées ont été enregistrées depuis entre les deux pays. Si l’Algérie a nommé Abdelfettah Daghmoum en tant qu’ambassadeur en novembre 2023, vingt mois après la vacance du poste suite au rappel de Saïd Moussi en poste à Madrid au début de la brouille, les relations n’ont pas retrouvé leur normalité. Abdelaziz Rahabi, ancien ambassadeur d’Algérie à Madrid et ex-ministre, a livré son analyse sur la situation des relations algéro-espagnoles, un dossier qu’il connaît bien, dans une interview accordée au média espagnol El Independiente.

L’ancien diplomate a puisé dans sa longue expérience pour retracer le parcours des relations entre Alger et Madrid depuis l’ère de la dictature de Franco en passant par la transition démocratique arrivant jusqu’à l’époque des deux dernières décennies d’avant la crise provoquée par le revirement de Pedro Sanchez. Pour Abdelaziz Rahabi, la relation entre Alger et Madrid souffre d’un problème de confiance. « Nous perdons ce qui est important : l’aspect stratégique de la relation. Pour cela, nous avons besoin de beaucoup de confiance et c’est ce que nous avons perdu. En général, nous n’avons pas ce niveau de
confiance », a-t-il expliqué. Revenant sur l’abandon de la neutralité qui a toujours caractérisé la position espagnole sur son ex-colonie, le Sahara occidental, Rahabi estime que l’alignement du gouvernement,

«L’Espagne a perdu sa force de puissance modératrice»

Sanchez sur la position du Maroc a fait que l’Espagne a perdu « sa force et son statut de puissance modératrice sur la question du Sahara occidental » en choisissant « le statut de n’importe quel autre pays européen ». L’ancien ministre et diplomate pense qu’un retour de l’Espagne à sa position neutre adoptée depuis le début du conflit du Sahara occidental est primordial pour un retour à la normale avec l’Algérie. « L’Algérie a beaucoup apprécié le discours de Sanchez à l’assemblée générale des nations unies en septembre. C’est la ligne traditionnelle de l’Espagne, qui lui donne poids et autorité dans le conflit du Sahara occidental. Il faut que l’Espagne admette que le plan marocain d’autonomie est une option parmi d’autres et non pas la seule solution possible », a-t-il ajouté.

Le 18 mars 2022, le palais royal marocain avait annoncé que le chef du gouvernement espagnol, alors en visite à Rabat, avait déclaré que le plan d’autonomie proposé par le Maroc était la piste la plus réaliste au règlement du conflit du Sahara occidental. L’annonce avait provoqué une réaction immédiate de l’Algérie qui avait rappelé son ambassadeur à Madrid, Saïd Moussi. En juin 2022, l’Algérie a accentué sa riposte au revirement espagnol concernant le Sahara occidental en suspendant le traité d’amitié et de bon voisinage signé entre les deux pays vingt ans auparavant.

Dans la foulée, les banques algériennes ont été instruites de ne pas domicilier les transactions avec l’Espagne. La crise a pris le chemin du règlement début 2024 avec l’autorisation de l’importation des intrants avicoles puis des viandes fraîches. La visite du ministre des affaires étrangères espagnol José Manuel Albares devait sceller la fin de la brouille, avant que son report ne soit annoncé à la dernière minute. Deux ans après son revirement, Pedro Sanchez n’arrive pas à convaincre avec sa nouvelle position sur le Sahara occidental. A la fin de la semaine dernière, le congrès des députés a voté une résolution appelant Pedro Sanchez à revenir à une position équilibrée. Le texte porté par le parti populaire de droite a été également voté par les députés affiliés à des formations politiques membres de la coalition gouvernementale que préside Pedro Sanchez, dont Sumar.

C’est dire que l’alignement de Pedro Sanchez sur la thèse marocaine ne fait pas l’unanimité au sein de la classe politique espagnole ni à l’intérieur même du gouvernement qu’il dirige.

L’Algérie Aujourd’hui, 18/03/2024

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