Conseil de Sécurité : La Russie critique la résolution sur le Sahara Occidental

Une fois de plus, la Russie a démontré qu'elle préfère éviter la question du Sahara pour éviter la colère du Maroc.

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Une fois de plus, la Russie a démontré qu’elle préfère éviter la question du Sahara pour éviter la colère du Maroc. Depuis des années, Moscou critique la résolution du Conseil de sécurité sur le Sahara occidental à l’occasion du renouvellement du mandat de la Minurso. La rédaction du texte proposé pour la résolution est confiée aux États-Unis.

Cette année ne fait pas exception. Washington a proposé un projet aussi pro-marocain que beaucoup d’autres qui l’ont précédé. Il est clairement favorable à une solution basée sur une autonomie négociée et s’oppose à la surveillance des droits de l’homme par la MINURSO. Comme c’est l’habitude depuis 2 ou 3 ans, la Russie exprime ses réserves à l’égard d’une résolution qu’elle qualifie de partielle et déséquilibrée, sans aller jusqu’à user de son droit de veto sur un texte sans changements majeurs par rapport à la résolution qui a renouvelé le mandat du Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO) pour un an en octobre 2022.

Lundi après-midi (30 octobre), le Conseil de sécurité devrait voter un projet de résolution renouvelant le mandat de la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO) pour une année supplémentaire, jusqu’au 31 octobre 2024, rapporte le site Security Council Report.

Avant les négociations sur le renouvellement du mandat de la MINURSO, les membres du Conseil ont tenu leurs consultations semestrielles avec l’Envoyé personnel du Secrétaire général pour le Sahara occidental Staffan de Mistura et le Représentant spécial du Secrétaire général pour le Sahara occidental et chef de la MINURSO Alexander Ivanko le 16. Octobre.

Il semble que les négociations sur le projet de résolution se soient généralement déroulées sans heurts. Les États-Unis, auteurs de la question du Sahara occidental, ont fait circuler un premier projet de résolution le 20 octobre et ont convoqué un cycle de négociations mardi 24 octobre. Le Mozambique et la Russie ont ensuite proposé quelques amendements. Le rédacteur a ensuite placé le projet inchangé sous procédure tacite mercredi (25 octobre) jusqu’au lendemain. La Russie a rompu le silence, affirmant que le projet de texte était déséquilibré et n’intégrait pas les changements qu’elle avait proposés. Néanmoins, hier (26 octobre), les États-Unis ont mis en bleu un projet de texte inchangé.

Il semble que le rédacteur ait souhaité un simple renouvellement du mandat de la MINURSO, sans apporter de modifications substantielles aux dispositions contenues dans la résolution 2654 du 27 octobre 2022, qui a récemment prolongé le mandat de la mission. Le projet de résolution en bleu souligne la nécessité de parvenir à une solution politique réaliste, réalisable, durable et mutuellement acceptable à la question du Sahara occidental, basée sur un compromis. Il souligne en outre l’importance d’un engagement renouvelé des parties à faire progresser le processus politique en vue de la poursuite des négociations. La résolution souligne également l’importance pour « toutes les parties concernées d’élargir leurs positions afin de faire avancer une solution ».

Le rédacteur a incorporé quelques nouveaux éléments dans le projet de résolution reflétant les développements récents. Le projet de texte en bleu salue la convocation par de Mistura de consultations informelles avec le Maroc, le Front Polisario (l’entité représentant les habitants de la région du Sahara occidental, connus sous le nom de Sahraouis), l’Algérie et la Mauritanie, ainsi qu’avec les membres du Groupe. des Amis du Sahara Occidental—France, Russie, Espagne, Royaume-Uni et États-Unis—du 27 au 31 mars à New York. Le dernier rapport du Secrétaire général sur la MINURSO, daté du 3 octobre, notait que ces consultations bilatérales informelles visaient à discuter des enseignements tirés du processus politique, à approfondir l’examen des positions et à continuer de rechercher des « formules mutuellement acceptables » pour faire avancer le processus politique.

Selon le rapport du Secrétaire général, lors des consultations bilatérales informelles, le Maroc a réitéré sa position selon laquelle sa proposition d’autonomie était la seule issue viable d’un processus politique. (Le plan, que le Maroc a soumis à l’ONU en 2007, appelle à l’intégration du territoire au Maroc, le peuple sahraoui gérant ses affaires intérieures tout en étant représenté à l’extérieur par le Maroc.) D’autre part, le Front Polisario a réaffirmé que l’autodétermination reste la seule base de tout processus politique.

Le rapport du Secrétaire général souligne également plusieurs défis qui pèsent sur la capacité de la mission à maintenir sa présence sur le terrain, notamment les contraintes pesant sur la chaîne d’approvisionnement logistique et de maintenance de la MINURSO vers les bases d’opérations à l’est du berme. (La berme fait référence à un mur de terre d’environ 1 700 milles de long qui sépare la partie du Sahara occidental sous administration marocaine de celle détenue par le Front Polisario.) À la suite d’un engagement de haut niveau qui a eu lieu entre avril et juin, la MINURSO a pu effectuer cinq mouvements de convois terrestres distincts pour réapprovisionner ses bases d’opérations à l’est du berme d’Agwanit, Mehaires, Mijek et Tifariti en carburant, autres fournitures d’entretien et matériel d’ingénierie dont ils ont un besoin urgent. Dans ce contexte, les États-Unis ont introduit un nouveau langage dans le projet de résolution saluant les progrès réalisés par la MINURSO pour le réapprovisionnement de ses bases d’opérations afin de soutenir ces opérations cruciales.

Au cours du seul cycle de négociations, il apparaît que plusieurs membres du Conseil, dont la France, le Gabon et les Émirats arabes unis (EAU), ont soutenu l’approche du rédacteur et ont appelé au maintien du projet de résolution tel quel. Cependant, le Mozambique et la Russie ont apparemment considéré le projet de texte comme déséquilibré et ont proposé plusieurs révisions.

L’une de leurs principales préoccupations était que le projet de résolution distingue plus clairement le Maroc et le Front Polisario des pays voisins concernés, à savoir l’Algérie et la Mauritanie. Il semble que le Mozambique et la Russie aient également proposé d’ajouter un nouveau libellé soulignant la nécessité de permettre au peuple sahraoui d’exercer son droit à l’autodétermination par l’organisation d’un référendum. La Russie a apparemment également proposé un libellé appelant la MINURSO à mettre pleinement en œuvre son mandat consistant à organiser un référendum. Il semble que la Russie ait maintenu sa préoccupation, qu’elle avait également exprimée les années précédentes, quant à la dilution des références dans les résolutions de la MINURSO au référendum et à l’autodétermination du peuple du Sahara occidental.

En outre, le Mozambique et la Russie souhaitaient apparemment que le projet de résolution inclue une référence plus large aux contributions de tous les envoyés personnels précédents, au lieu de cibler l’ancien envoyé personnel Horst Köhler, ce qui semblait donner plus de poids au format de table ronde qu’il avait initié en 2018 et 2019. (Ce format a réuni l’Algérie, la Mauritanie, le Maroc et le Front Polisario.) L’Algérie s’est longtemps opposée au format de table ronde, qu’elle considère comme susceptible de recadrer la situation comme un conflit régional, au lieu d’un conflit entre le Maroc et le Front Polisario. (Pour en savoir plus, consultez notre histoire du 26 octobre 2022 What’s in Blue.)

Il semble que le Mozambique ait proposé un nouveau libellé soulignant la nécessité urgente d’inclure une composante de surveillance des droits de l’homme pour un suivi étroit de la situation des droits de l’homme sur le territoire du Sahara occidental dans le cadre du mandat de la MINURSO. La question de la situation des droits de l’homme au Sahara occidental a été régulièrement soulevée dans les rapports du Secrétaire général. Selon son dernier rapport, le Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH) n’a pu effectuer aucune visite au Sahara occidental pour la huitième année consécutive, malgré de multiples demandes et l’appel du Conseil de sécurité à une coopération renforcée avec le HCDH dans la résolution 2654. Le rapport ajoute que le HCDH continue de recevoir des allégations faisant état d’un rétrécissement accru de l’espace civique, notamment par des obstructions, des intimidations et des restrictions à l’encontre des militants sahraouis, des défenseurs des droits de l’homme et des mouvements étudiants.
Cependant, il semble que le projet de résolution en bleu n’inclue aucun des changements proposés par le Mozambique et la Russie. Alors que les États-Unis placent un texte inchangé en bleu, il n’est pas clair si le Mozambique et la Russie soutiendront la résolution lors du vote de lundi. Les adoptions de mandats de la MINURSO ne sont pas unanimes depuis le 28 avril 2017. Depuis, les membres permanents Chine et Russie et membres élus Bolivie (2017-2018), Éthiopie (2017-2018), Afrique du Sud (2019-2020), Tunisie (2020-2021). ), et le Kenya (2021-2022) se sont abstenus sur une ou plusieurs résolutions de la MINURSO.

Depuis plus de 6 ans, la résolution sur le renouvellement du mandat de la MINURSO n’est pas votée par unanimité. Pour ne pas froisser le Maroc, la Russie n’a pas utilisé son droit de veto contre la résoluction. Lundi prochain, la Russie fera-t-elle de même? Très probable, malgré que le Sahara Occidental constitue l’un des derniers vestiges de l’ordre mondial imposé par Washington et critiqué par Moscou.

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