Maroc : Abdelmalek Alaoui publiait des articles au nom d’Amina Bouayach

Abdelmalek Alaoui, à l’époque patron de la boîte de conseil et lobbying Global Intelligence Partners, rédigeait des articles qu’il proposait à la DGED de publier avec la signature d’Amina Bouayach, président du CNDH. Dans ce cas, il propose l’article suivant

Projet des Médias au Maroc : projet de censure ?

Par Mme Amina BOUAYACH*

A l’heure des mutations et de l’aspiration des sociétés de l’Afrique du Nord et du Moyen Orient à la liberté et au respect des droits humains, les réformes mises en place par le Maroc ont pour finalité d’affronter les impératifs de modernisation de ses institutions et la restructuration de la gestion des Affaires publiques. L’opinion publique est confrontée, à nouveau, à l’éclaircissement du cadre référentiel des mutations qu’elle a entreprise.

Le débat actuel relatif au cahier des charges des médias publics marocains reflète-t-il peut-être une certaine réticence vis-à-vis des nouvelles dispositions constitutionnelles précisant l’identité plurielle et garantissant les droits et libertés des individus et la place des langues dans la société.
Le projet en question aspire à l’uniformisation de l’opinion publique, par l’imposition d’une langue dominante, la limitation des ressources financières provenant de la publicité, et la dissuasion à la créativité artistique aussi bien individuelle que collective.

Ce débat musclé et acharné n’est pas limité uniquement à la répartition des heures d’antennes ou d’écoute, le contenu des émissions, mais s’étend au-delà, touchant à la problématique de la modernité des médias quant aux valeurs des droits de l’homme et le pluralisme de la société
En effet, l’histoire de l’organisation des médias publics au Maroc, a toujours été intimement liée aux tentatives de démocratisation et d’ouverture de la société.

La décision politique d’ouvrir les médias aux différents courants de pensée présents au Maroc fut prise dès 1993 lors d’un séminaire national. Elle fut suivie par l’autorisation de la mise en place d’une radio étrangère à Tanger,
*Ancienne Présidente de l’Organisation Marocaine des Droits Humains
l’installation d’une deuxième chaine, la libéralisation des médias en fin de mandant du gouvernement Youssoufi en 2002 , l’accréditation des radios privées et puis d’un débat national relatif au médias et la société tenu au parlement en Janvier 2010.

Le débat actuel met- il la société marocaine et ses représentants à l’épreuve de son pluralisme et de son identité diverse, de ses acquis en matière de consolidation de la démocratie et de l’élargissement de ses libertés ?
Bien que les clauses énoncées par le cahier de charge exhortent à la protection de la spécificité culturelle et l’identité de la société marocaine, ces valeurs ne sont-elles que des outils s’intégrant dans le système universel des droits de l’homme qui est le référentiel adopté par la communauté internationale pour le respect de la dignité et des droits fondamentaux de l’être humain.

Autant une société « se démocratise », autant le champ des libertés individuelles et collectives s’élargit et devient une priorité dans l’action de protection des droits de l’homme, autant la spécificité culturelle et l’identité de la société sont appelées à changer et à progresser, au sein d’un référentiel universel constant constituant la norme hiérarchique assimilant les spécificités de chacun.

Le cahier des charges des médias veut substituer un système de médias/ service public dédié à la prédication et au sermon à des médias détenant le rôle fondamental de 4ème pouvoir de la société.

L’instabilité inhérente au processus de mutation que subit l’Afrique du Nord et du Moyen Orient est un nouveau défi auquel les médias devront s’adapter et jouer leur rôle de catalyseur du débat politique et culturel multiple dont toute la société en phase de démocratisation a besoin.

Ainsi les médias doivent-ils non seulement refléter la dynamique d’une société en progression, mais aussi de libérer les initiatives d’appréhender les aspirations de la société dans sa lutte pour le pluralisme, pour la promotion de la participation aux affaires publiques, et son combat pour la bonne gouvernance.

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