Rabat accuse Alger de faire de la «surenchère stérile» : APRÈS LA PUBLICATION DU BILAN DE LA LUTTE ANTIDROGUE EN ALGÉRIE

Le traitement par Algérie presse service (APS, agence officielle) du rapport de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (Onudc)
Par Hasna Yacoub 
Le traitement par Algérie presse service (APS, agence officielle) du rapport de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (Onudc), publié mardi dernier dans un dossier englobant le bilan de la lutte antidrogue en Algérie et les déclarations de responsables de la lutte contre ce fléau, a fait réagir de go le gouvernement marocain. Le royaume Chérifien qui n’a pas jugé utile de commenter ce rapport, publié pourtant depuis juin dernier, n’a pas manqué de répliquer au lendemain de la publication d’un dossier traitant de l’inondation de l’Algérie par le cannabis marocain. 
«Le Maroc a toujours traité la question de la culture du cannabis avec transparence et détermination, loin de toute surenchère stérile», a déclaré le ministre de l’Intérieur marocain, Mohamed Hassad, qui réagissait, selon l’agence Maghreb arabe presse (MAP), «aux déclarations de responsables algériens sur la lutte anti-drogue».
Le Maroc «a entrepris une démarche volontariste avec l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime pour réduire progressivement la culture et le trafic du cannabis», a encore expliqué le responsable marocain. Le ministre Hassad a assuré que l’effort du gouvernement marocain est porté sur la réduction des superficies de production de cannabis «notre objectif à très court terme est de réduire ces superficies à moins de 30 000 ha cultivés». Mais il a omis de dire que dans son pays, un débat politique sur la légalisation de la culture du cannabis à des fins médicinales est actuellement ouvert.
Le gouvernement marocain accuse Alger de faire de la «surenchère stérile» parce que ses responsables ont juste rappelé une situation connue par tous et établie dans des rapports internationaux. Quelle surenchère peut-il y avoir dans ce cas à partir du moment que l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (Onudc) classe le royaume comme le premier producteur mondial de cannabis, devant l’Afghanistan ? Quelle surenchère peut-il y avoir quand ce responsable rappelle (c’est plus un aveu sans contrainte qu’un rappel) qu’au cours des six premiers mois de 2014, «plus de 100 tonnes de résine de cannabis ont été saisies et que 98 réseaux de trafiquants ont été démantelés» ! Aux 100 tonnes de résine de cannabis saisis au Maroc, il faut ajouter les 100 tonnes de cette drogue saisis en Algérie durant la même période. 
Un simple calcul d’addition renseigne sur le drame vécu quotidiennement par l’Algérie. Car et selon les responsables de la lutte contre la drogue en Algérie, une dizaine de tonnes de cannabis est pratiquement saisie chaque mois en Algérie et les quantités saisies ne représentent que 40% des quantités introduites. Ce qui démontre l’ampleur prise par le trafic de stupéfiants qui vient des frontières ouest. Malgré cette situation catastrophique, c’est Alger qui fait de la «surenchère stérile» ! Loin de ces chiffres alarmants, il faut dire qu’entre Rabat et Alger, il y a un lourd passif. Le «désaccord» entre ces deux pays frontaliers ne date pas d’aujourd’hui et il est loin de se limiter à la question du Sahara occidental même si ce problème constitue la pomme de la discorde. De ce fait, le Royaume Chérifien ne rate pas une occasion pour tirer à boulets rouges contre l’Algérie. Et apparemment même quand l’occasion ne s’offre pas, il en crée une. C’est le cas de le dire aujourd’hui avec la déclaration du ministre de l’Intérieur marocain qui accuse les responsables algériens de faire de la surenchère. Une situation presque anodine et c’est le contraire qui aurait été étonnant. Faut-il rappeler les accusations contre l’Algérie d’avoir soutenu Kadhafi par des mercenaires, évoquées par les rebelles libyens mais concoctés dans les caveaux du Makhzen ? Faut-il rappeler aussi les manœuvres désespérées du Maroc au moment où l’Envoyé personnel du Secrétaire général de l’ONU pour le Sahara occidental, Christopher Ross, avait présenté au Conseil de sécurité son compte-rendu sur la question sahraouie. À la même époque, le royaume chérifien avait décidé de rappeler son ambassadeur à Alger. Il ne s’agissait, certes pas, d’une coïncidence, mais bien d’un calcul politicien des Marocains afin de retarder encore les négociations menées par l’ONU qui visaient à trouver une issue au problème sahraoui. Le Maroc avait rappelé pour consultation son ambassadeur à Alger, en raison de récents propos du président Abdelaziz Bouteflika sur le Sahara occidental, qualifiés de «provocateurs» et «foncièrement agressifs» par Rabat. L’agence marocaine (MAP) avait alors décidé d’alimenter la polémique en accusant l’Algérie de chercher à «servir ses desseins hégémoniques dans la région».
Il s’agissait en réalité, d’un subterfuge pour brouiller les cartes et tenter de faire échouer les négociations menées par l’Envoyé spécial de l’ONU. Le ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra avait, tout de go, réagit en qualifiant d’«irresponsable» et d’«inadmissible» l’attaque médiatique menée par l’agence de presse, appelant les «Frères marocains à la retenue». Pour le ministère des Affaires étrangères «cette décision injustifiée constitue une escalade malencontreuse qui s’appuie sur des motifs fallacieux et attentatoires à la souveraineté de l’Algérie, dont les positions de principe sur les questions régionales et internationales ne sont susceptibles d’aucune remise en cause sous l’effet d’interférences étrangères». Non dupe des intentions marocaines de créer un incident qui détournerait les regards du problème du Sahara occidental au moment même où la question est traitée par l’ONU et le Congrès américain, Alger avait décidé de faire échouer le subterfuge du royaume chérifien en déclarant «maintenir en place l’ensemble de ses missions diplomatiques et consulaires dans le royaume du Maroc». 
Faut-il rappeler aussi, les attaques qui ont visé l’Algérie dans un discours du roi Mohamed VI ou encore l’attaque du consulat d’Algérie à Casablanca, le 1er novembre dernier. Une attaque qui est «une violation du droit international. Il y a eu un premier forfait avec la violation du consulat, un second avec l’atteinte au drapeau national, aggravé par le fait que cela a été commis un premier novembre», avait déclaré à l’époque M. Lamamra qui avait insisté sur le fait que l’Algérie ne tient pas à répondre aux provocations du royaume chérifien en déclarant «en diplomatie, le silence peut être extrêmement éloquent. Nous ne souhaitons pas faire quotidiennement des commentaires. Il y a cependant faillite morale chez ceux qui transgressent le droit international». Il ne s’agit-là que des dernières attaques menées contre l’Algérie alors que le passif entre les deux pays est lourd. Ahmed Ouyahia, alors qu’il était Premier ministre, avait bien expliqué que les relations algéro-marocaines ne sont guère «conditionnées par le problème du Sahara occidental», mais «la réouverture des frontières terrestres entre les deux pays n’est pas à l’ordre du jour jusqu’à ce qu’un climat de sérénité soit instauré». Et c’est loin d’être le cas, il faut le reconnaître. Rappelons que les frontières algéro-marocaines sont fermées depuis 1994 sur décision des autorités algériennes. Une réponse qu’elles ont voulue brusque et ferme à la campagne lancée à l’époque par les autorités marocaines à l’encontre des Algériens les accusant d’exporter le terrorisme vers leur pays. Mais depuis, les Marocains n’ont cessé de multiplier les appels pour la réouverture de ces frontières après avoir constaté une perte d’un minimum de 2 milliards de gains. Mais le coup est parti et Alger qui a accepté à plusieurs reprises de discuter de la réouverture des frontières, exige le règlement global de tous les dossiers en suspens : contrebande, trafic de drogue et terres spoliées. Car, Alger est loin d’être dupe aujourd’hui et sait que le Maroc ne rate pas une occasion pour l’affaiblir comme il a tenté de le faire en 1994 avec l’attentat de Marrakech ou encore en 1976 avec l’affaire Amgala. 
Les autorités algériennes se sont habituées à cette attitude de leur voisin. 
Il leur est difficile aujourd’hui de lui tourner le dos par peur de se voir «poignarder». 
H. Y.
http://www.latribune-dz.com/news/article.php?id_article=7862

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