Javier Bardem : L’homme qui a dynamité l’axe Paris-Rabat

On connaît l’acteur espagnol qui a brillé dans No Country for old men (oscar du meilleur second masculine rôle 2008) ou dans l’Amour au temps du choléra, et plus récemment dans le dernier James Bond Skyfall, ou Mange, aime, prie aux cotés de Julia Roberts. On en parle malheureusement moins, surtout ici en Algérie, en tant que virulent militant pour l’indépendance du Sahara occidental. A l’occasion d’une énième activité militante à Paris, où il a critiqué la politique française, c’est Javier Bardem qui a provoqué la crise diplomatique inédite entre la France et le Maroc.

Celle-ci a pris des proportions extraordinaires avec les sit-in de dénonciation «spontanés» qu’organisent les autorités marocaines devant l’ambassade de France à Rabat. Et mercredi soir, le Maroc a démontré qu’il optait pour l’escalade en décidant de suspender les conventions de coopération judiciaire avec la France. «Pour en évaluer l’impact et les actualiser dans le but de remédier aux dysfonctionnements qui les entachent», explique le communiqué du ministère de la Justice marocain. Concrètement, cela signifie que le magistrat marocain accrédité en France pour servir de liaison avec ses homologues est rappelé à Rabat. Et que les nombreux mécanismes d’interaction entre les deux systèmes judiciaires sont stoppés, ce qui risque d’avoir un impact non seulement sur les nombreuses affaires concernant les citoyens franco-marocains, mais également sur l’échange de renseignement sur des dossiers importants (terrorisme, criminalité, immigration…).

Tout a commencé par des propos prêtés à un haut diplomate français, qualifiées par Rabat de «scandaleux et inadmissibles», qui enveniment les relations d’ordinaire chaleureuses entre les deux pays. Citant l’acteur espagnol, Javier Bardem, auteur d’un documentaire sur le Sahara occidental, Le Monde a rapporté, jeudi dernier, des propos prêtés à l’ambassadeur de France aux Etats-Unis, François Delattre.

Un pavé dans la mare Le Maroc est une «maîtresse avec laquelle on dort toutes les nuits, dont on n’est pas particulièrement amoureux, mais qu’on doit défendre», aurait affirmé ce dernier en 2011, selon Javier Bardem. Selon Le Monde, l’acteur aurait ensuite changé de version pour citer, plutôt, un autre diplomate français, l’ambassadeur Gérard Araud. Lequel, selon le quotidien électronique Mediapart, compte déposer plainte contre Javier Bardem. La polémique est loin d’être close. Mais ce qui donne assez de crédit, sur le fond du moins, aux propos de l’acteur, c’est que dans son documentaire, diffusé en 2012, l’une des scènes les plus fortes est peut-être son rire jaune lorsqu’il raconte que l’ambassadeur de France à l’ONU lui a dit, en substance que la France et le Maroc sont comme un vieux couple. «Parfois, le partenaire fait des choses pas bien, mais on fait semblant de ne rien voir pour rester ensemble».

En deux ans, en l’absence d’une réaction marocaine, aucune réaction française n’avait été observe à l’égard de ces propos inhabituels, alors que Paris est un soutien traditionnel du royaume sur le dossier du Sahara. Un éditorialiste français souligne que «malgré un démenti du Quai d’Orsay, la mèche est allumée».

Dimanche soir, le porte-parole du gouvernement marocain a fustigé des «mots blessants» et des «expressions humiliantes ». Ils sont d’autant plus inadmissible que le Maroc «ne cesse d’oeuvrer pour le renforcement des relations bilatérales», a-t-il ajouté, espérant, en retour, que la France «saura réparer le mal causé par ces propos».

Le problème, qui rend l’incident difficile à dépasser, c’est que cette polémique intervient alors que la France et le Maroc connaissent déjà un sérieux coup de froid diplomatique, à la suite de deux plaintes déposées à Paris contre un haut responsable marocain la semaine passée. Jeudi dernier, l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (ACAT) a, en effet, saisi l’opportunité de la presence en France du patron du contre-espionnage marocain, Abdellatif Hammouchi, pour demander aux autorités d’entendre ce responsable, qu’elle accuse de «complicité de torture». Sans passer par les canaux diplomatiques, sept policiers se sont rendus à la résidence de l’ambassadeur du Maroc à Paris pour notifier ce dernier une convocation.

Des méthodes et une mise en cause qui ont entraîné une vive réaction : rejetant «catégoriquement» les accusations et déplorant un «incident rare et inédit», la diplomatique marocaine a décidé de convoquer l’ambassadeur de France à Rabat. Un geste rare à la symbolique forte, qui en dit long sur la gravité de la situation. Loin de s’apaiser malgré des excuses à demi-mot de Paris, la tension demeurait très forte, dimanche dernier, quand une nouvelle plainte pour «torture», a en effet été déposée en France contre ce même homme, cette fois par un ancien détenu, le champion de boxe, Zakaria Moumni.

Militant contre-courant

Dans ce contexte, le pavé jeté dans une  mare assez trouble au demeurant par Javier Bardem est à même de dynamiter l’axe Paris-Rabat pour de longs mois. L’acteur se trouvait à Paris, en compagnie de la militante sahraouie, Aminatou Haidar, pour la promotion de son documentaire. Javier Bardem est un fervent défenseur de la cause sahraouie. L’acteur espagnol a coproduit un documentaire Hijos de las nubes, la ultima colonia (les fils des nuages, la dernière colonie, 2012). Il participe à plusieurs manifestations, notamment à Madrid en faveur de la cause sahraouie.

L’acteur espagnol, Javier Bardem, signe le 4 octobre une tribune dans le quotidian El País pour réaffirmer le droit du people du Sahara occidental à décider de son avenir. Ce même jour, il plaide à l’appui de cette déclaration la cause sahraouie à l’ONU. Dans sa déclaration, il affirme que «les habitants du Sahara occidental souffrent sous la répression dans ce territoire occupé, ils souffrent dans des camps de réfugiés dans le désert du Sahara, où ils ont été oubliés depuis des décennies».

Décrit dans sa page wikipedia comme un «parangon du latin viril grâce à ses rôles sulfureux chez Bigas Luna et Pedro Almodóvar», Javier Bardem est le premier acteur espagnol à avoir été nommé aux oscars en 2001 et à en être recompense en 2008 comme «meilleur second rôle masculine » pour son interprétation de tueur froid et implacable dans No country for old men. Ce rôle lui a aussi valu un Golden Globe dans la même catégorie. Javier Bardem a également reçu le Prix d’interprétation masculine au Festival de Cannes 2010 pour le film Biutiful d’Alejandro González Iñárritu, deux Coupes Volpi du meilleur acteur à la Mostra de Venise (en 2000 et en 2004) ainsi que cinq Prix Goya en Espagne. Le 8 novembre 2012, à la veille de la sortie aux Etats-Unis du dernier opus de James Bond Skyfall, Javier Bardem reçoit son étoile sur le mythique Hollywood Walk Of Fame, à Hollywood boulevard.

Les Débats, 01/03/2014





A cause du veto de la France au Conseil de Sécurité, la MINURSO (mission de l’ONU au Sahara Occidental) ne peut rapporter sur la situation des droits de l’homme dans cette dernière colonie africaine.
En vue de mettre fin à cette anomalie, nous vous prions de bien vouloir signer cette pétition adressée à Ban Ki-moon pour demander l’élargissement du mandat de la MINURSO pour la surveillance des droits de l’homme : 


https://secure.avaaz.org/fr/petition/Ban_Kimoon_Elargir_les_competences_de_la_MINURSO_pour_la_supervision_du_respect_des_dr/?copy

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