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par Mustapha Aggoun
Kirk Charles n’était pas seulement l’un de ces défenseurs acharnés du port d’armes aux États-Unis. Il incarnait aussi une idéologie, une vision du monde : celle d’une Amérique blanche, sûre d’elle-même, convaincue de sa supériorité et prête à sacrifier la vie des autres au nom d’un privilège qu’elle érige en liberté sacrée.
Lorsqu’un citoyen l’interpella sur les dizaines de milliers de morts provoquées, chaque année, par cette prétendue «liberté» de port d’arme, il répondit avec la froideur de ceux qui ne doutent jamais : *«C’est le prix à payer pour notre défense personnelle.»* Comme si les cercueils s’empilaient au nom d’un idéal supérieur, comme si les larmes des mères n’étaient qu’un tribut nécessaire à cette «civilisation» armée.
Mais l’ironie, tragique et implacable, a fini par le rattraper. Kirk Charles est tombé, lui aussi, non pas en héros, mais en victime banale de cette Amérique qu’il rêvait de cuirasser. Tué par les armes qu’il avait glorifiées, par le même citoyen armé qu’il présentait comme le garant de la sécurité nationale.
Ce n’est pas seulement le paradoxe d’un homme emporté par la logique de sa propre idéologie. C’est le symbole d’une Amérique malade, où la peur se déguise en liberté, et où la mort se camoufle en sécurité.
Mais Kirk Charles portait un autre fardeau, celui d’un discours raciste et révisionniste. Il n’hésitait pas à vanter la suprématie des Blancs, à nier l’existence même de la Palestine *«Je ne connais pas, ça n’existe pas»*, affirmait-il, effaçant d’un trait de mépris un peuple et son histoire. Dans son univers, les dominés n’avaient pas droit de cité, pas plus que les opprimés n’avaient droit à leur mémoire.
Ainsi, sa mort ne se réduit pas à une ironie personnelle. Elle devient le miroir d’une idéologie entière : croire que la violence est protectrice, croire que la domination est naturelle, croire que l’effacement des autres garantit sa propre existence. Or la violence finit toujours par se retourner contre celui qui l’adore, et l’histoire punit souvent les arrogants par les armes mêmes qu’ils glorifient.
Kirk Charles, apôtre de la gâchette et du déni, est tombé victime de ce qu’il croyait défendre. Le symbole est éclatant : une vie fauchée par la même logique qui a déjà condamné tant de vies américaines, noires, latines, pauvres, invisibles. Une logique qui, au nom de la sécurité, fabrique chaque jour son lot d’insécurité et de morts.
Sa disparition n’efface pas son héritage idéologique, mais elle en révèle l’absurdité : mourir au nom de la suprématie et de la liberté de tuer, c’est offrir au monde une fable noire, un avertissement que l’Histoire retiendra.
Source: Le quotidien d’Oran