Maroc, Algérie, Sahara occidental,
Depuis le début du XVIe siècle, comme évoqué dans un précédent article, synthèse du travail d’un historien, le Maroc, pour peu qu’il se trouve en position de puissance, ou qu’il se sente assez costaud pour faire une démonstration de force, casse tout sur son passage, comme un éléphant dans un magasin de porcelaine.
Il y a cinq siècles, il s’était senti pousser des ailes, avec l’appui de l’Espagne et du Portugal, les deux grandes puissances de l’époque, et s’en est allé détruire et piller Tlemcen, Ouargla, le Touat, et l’empire songhaï, à Tombouctou ; aujourd’hui, avec l’utopie d’un appui sans limite israélo-américain. S’étant lancé, tête la première dans la normalisation avec l’entité sioniste, le Maroc a cumulé les erreurs de jugement vis-à-vis de ses voisins, l’Algérie en premier lieu.
Depuis l’indépendance, le comportement marocain a renoué avec ses vieux démons expansionnistes. Avant l’annexion des territoires sahraouis, il y a eu le conflit frontalier de Tindouf. Une agression criminelle de la part du Maroc que les années n’ont pas effacé. Dès 1963, une « guerre des sables » avait opposé les deux voisins après plusieurs incidents frontaliers et leurs relations s’étaient gravement détériorées avec la « Marche verte » de 350.000 Marocains en direction du Sahara occidental en 1975.
Retour sur les dates-phares récentes, qui ont fait le lit de la rupture des relations annoncée avant-hier par le chef de la diplomatie algérienne, Ramtane Lamamra :
Rupture : Le 7 mars 1976, Rabat rompt ses relations diplomatiques avec l’Algérie après la reconnaissance par Alger de la République arabe sahraouie démocratique (RASD), autoproclamée par le Front Polisario.
Accord sur une libre circulation
Le 26 février 1983, le roi Hassan II et le président algérien Chadli Bendjedid se retrouvent en tête-à-tête à la frontière. En avril, la libre circulation est rétablie pour les résidents des deux pays et, en mai, un accord sur la libre circulation progressive des personnes et des biens ainsi que l’ouverture des lignes aériennes et ferroviaires est signé.
Reprise des relations Le 11 juillet 1987, le ministre algérien des Affaires étrangères rencontre Hassan II. Le 22 novembre, c’est au tour du chef de la diplomatie marocaine de se rendre à Alger. Le 16 mai 1988, Alger et Rabat annoncent la reprise de leurs relations diplomatiques. Le 5 juin, leurs frontières respectives sont officiellement rouvertes. Le 7 juin, Hassan II effectue sa première visite à Alger depuis 15 ans, où il participe à un sommet arabe extraordinaire. Début février 1989, la visite du président Bendjedid à Ifrane, la première d’un chef d’Etat algérien au Maroc depuis 1972, scelle la réconciliation. Un accord est conclu pour un projet de gazoduc devant relier l’Algérie à l’Europe, à travers le Maroc. En juin 1992, la promulgation par Rabat de la convention de juin 1972 met fin aux problèmes frontaliers à l’origine de la « guerre des sables ».
Fermeture des frontières
Mais, le 16 août 1994, les déclarations du président algérien Liamine Zeroual selon lesquelles il reste en Afrique « un pays illégalement occupé » -allusion au Sahara occidental- sont très mal perçues à Rabat. Le 26 août, le Maroc instaure un visa d’entrée pour les Algériens après l’attaque d’un hôtel de Marrakech où deux touristes espagnols ont été tués par des islamistes franco-maghrébins. Rabat accuse des services de sécurité algériens d’être derrière l’attentat. L’Algérie ferme sa frontière avec le Maroc. Le 25 juillet 1999, le président Abdelaziz Bouteflika assiste aux obsèques de Hassan II à Rabat. Mais ce début de réconciliation est brutalement freiné le 15 août après un massacre qui fait 29 morts dans le sud-ouest algérien. Bouteflika accuse le Maroc de faciliter l’infiltration d’islamistes armés.
Léger dégel
En mars 2005, une série de rencontres entre le président Bouteflika et Mohammed VI marque un « dégel ». En juillet 2011, le roi se prononce pour la réouverture des frontières terrestres et une normalisation des relations. M. Bouteflika affirme quelques mois plus tard sa volonté d’oeuvrer au « raffermissement » des relations « au mieux » des intérêts des deux pays. En décembre 2019, Mohammed VI appelle à ouvrir une « nouvelle page » dans un message de félicitations au nouveau président algérien Abdelmadjid Tebboune.
Normalisation Israël-Maroc
En décembre 2020, l’Algérie dénonce des « manœuvres étrangères » visant à la déstabiliser et pointe du doigt Israël après la reconnaissance par les Etats-Unis de la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental, en contrepartie d’une normalisation des relations de Rabat avec l’Etat hébreu. « Le conflit du Sahara occidental est une question de décolonisation qui ne peut être résolue qu’à travers l’application du droit international », réaffirme Alger.
Nouvelles tensions
Le 18 juillet 2021, Alger rappelle son ambassadeur à Rabat pour « consultations ». Un diplomate marocain a exprimé son soutien au séparatisme kabyle, en réaction à l’appui apporté par Alger aux indépendantistes sahraouis. Une ligne rouge pour Alger qui s’oppose à toute velléité indépendantiste de la Kabylie, région berbérophone du nord-est de l’Algérie. Le 31 juillet, à l’occasion de la fête du Trône, Mohammed VI déplore les « tensions » avec l’Algérie, réitérant son appel à rouvrir les frontières terrestres. Le 18 août, Alger annonce « revoir » ses relations avec le Maroc, accusé d’être impliqué dans les incendies meurtriers qui ont ravagé le nord du pays. –
Nouvelle rupture
Le 24, le ministre algérien des Affaires étrangères annonce la rupture des relations diplomatiques avec le Maroc, en raison « d’actions hostiles » du royaume.
L’Express, 26/08/2021
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