Quand un groupe devient un produit médiatique, ce n’est jamais seulement du spectacle. C’est le signe d’un glissement plus profond, celui d’un débat public qui renonce à son exigence pour privilégier la facilité.
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En France, le débat public tourne depuis plusieurs années autour d’un phénomène devenu presque mécanique : la transformation des « musulmans » en sujet permanent, rentable et inépuisable. Dans une boucle médiatico-politique bien huilée, chaque polémique, chaque fait divers, chaque loi débouchant de près ou de loin sur l’islam devient un levier sûr pour attirer l’attention, susciter l’émotion et engranger de l’audience.
Ce mécanisme n’a rien d’un hasard. Il constitue désormais une véritable stratégie éditoriale autant qu’un outil politique.
La fabrique d’un “problème” prêt à l’emploi
Le fonctionnement est implacable : une fraction de la classe politique cherche un thème simple, clivant et immédiatement compréhensible. Les rédactions, prises dans la course à la visibilité, suivent. Le “musulman” devient alors un symbole malléable, un miroir où l’on projette toutes les angoisses : sécurité, identité, modèle social.
Les nuances disparaissent. Les réalités sociales, multiples et souvent très éloignées des discours anxiogènes, sont écrasées par une rhétorique binaire : eux contre nous, modernité contre tradition, « valeurs républicaines » contre ce que certains décrivent comme une altérité radicale.
Peu importe la complexité. Ce n’est pas elle qui fait monter les audiences.
L’instrumentalisation de l’émotion
Le succès de cette mécanique repose sur un principe simple : l’émotion capte mieux que les faits.
Qu’il s’agisse d’un vêtement, d’un repas dans une cantine ou d’un incident isolé, le moindre élément devient prétexte à relancer un débat déjà épuisé. L’indignation est instantanée, les plateaux s’enflamment, les titres s’affichent en boucle.
Pendant ce temps, les études sociologiques, les données statistiques, les enquêtes approfondies — elles — restent reléguées loin derrière la dramaturgie permanente.
Une pauvreté politique camouflée derrière la provoc’
Là réside sans doute la plus grande médiocrité du procédé. En focalisant sans cesse le débat sur la question musulmane, une partie du champ politique esquive les enjeux majeurs :
• le pouvoir d’achat,
• l’hôpital,
• l’éducation,
• le logement,
• les fractures territoriales.
L’obsession identitaire sert alors de diversion. Elle remplace l’action par l’agitation, la réflexion par le réflexe.
Elle traduit l’impuissance autant qu’elle l’alimente.
Le coût démocratique d’un tel discours
Cette mise en scène permanente a un prix. Elle fragilise la cohésion sociale, alimente les préjugés et entretient une atmosphère d’hostilité qui n’a rien de théorique.
Elle conduit aussi à une banalisation dangereuse : celle où l’on accepte que des millions de citoyens soient réduits à un sujet d’audience, plutôt qu’à des acteurs à part entière de la vie nationale.
Quand un groupe devient un produit médiatique, ce n’est jamais seulement du spectacle. C’est le signe d’un glissement plus profond, celui d’un débat public qui renonce à son exigence pour privilégier la facilité.
Un pays qui se regarde dans un seul miroir finit par ne plus voir le monde autour de lui.
MH
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