Au Maroc, il y a quelques semaines, une étrange fièvre s’est emparée du pays : l’obsession soudaine pour le lieu où se trouvait le président algérien, Abdelmadjid Tebboune. Il a suffi de deux semaines d’absence, officiellement annoncées comme des vacances privées, pour que les médias de propagande marocains se lancent dans des spéculations délirantes.
Des porte-paroles nerveux, des commentateurs exaltés, des rumeurs de maladie, des complots de palais… tout un festival d’hystérie collective autour d’un président qui se reposait simplement.
La réponse a été aussi simple qu’humiliante pour Rabat. Tebboune est revenu, souriant et reposé, a repris son agenda public avec des réunions télévisées et a mis en évidence le vide de ceux qui ont tenté de construire un scandale là où il n’y en avait pas. À ce moment-là, il est devenu clair que le Maroc s’inquiète davantage des faits et gestes de son voisin que de sa propre réalité interne.
La vraie question n’est pas de savoir où se trouve Tebboune, la question qui dérange est plutôt où se trouve Mohamed VI. Le roi qui passe plus de temps à Paris qu’à Rabat. Le monarque qui disparaît pendant des semaines sans dépêches ni audiences, alors que la misère se multiplie dans son pays. Le « commandeur des croyants » qui passe plus de nuits dans des clubs privés que dans la politique d’État.
Alors que des millions de Marocains manquent d’hôpitaux dignes, d’eau potable et d’écoles fonctionnelles, leur roi se montre dans des fêtes privées entouré de boxeurs et d’amis de jeunesse. Alors que d’autres chefs d’État travaillent pour donner à leur pays une place dans le monde, Mohamed VI accumule les absences et les affronts. Il suffit de se souvenir de l’épisode rapporté par le journal français Le Monde, lorsqu’il a posé un lapin à un haut fonctionnaire américain parce qu’il dormait, tout simplement, après une nuit d’excès.
En Algérie, ce sont les institutions, les ministres, une armée, un État doté d’organes qui fonctionnent au-delà de la figure du président qui gouvernent. Au Maroc, la vie politique entière dépend de l’humeur d’un homme absent, de ses voyages privés, de ses fêtes et de ses silences.
L’obsession pour Tebboune ne reflète pas un intérêt pour l’Algérie, elle reflète une peur de son propre vide. Les Marocains ne devraient pas tant se demander où se trouve le président algérien. La question qui devrait les empêcher de dormir est une autre : où est leur roi ?