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France-Algérie : Le pire scénario reste plausible

Logo Maghreb Online 28 fev 2025


C’est un scénario que personne ne souhaite, mais que beaucoup évoquent à voix haute : une crise diplomatique totale entre l’Algérie et la France. C’est impensable, mais néanmoins possible. Plus d’ambassades ni de consulats, des visas gelés, des liaisons aériennes et maritimes suspendues, la coopération mise en pause. Entre deux pays soudés — et parfois meurtris — par une histoire commune, l’onde de choc serait immédiate, humaine, économique et géopolitique.

Un choc humain sans précédent

Les premiers concernés seraient plus de deux millions de personnes d’origine algérienne vivant en France. Sans relais consulaire, leur quotidien serait chamboulé : renouvellement de papiers, état civil, aide d’urgence, rapatriements de corps, autant de démarches qui se retrouveraient soudainement orphelines d’institutions. Les familles des deux rives se heurteraient au mur des frontières, privées de vols directs et de procédures de visas. C’est une catastrophe humaine, mais elle reste surmontable pour les Algériens qui placent leur dignité au-dessus de tout.

Flux économiques déconnectés, coûts croissants

Le commerce bilatéral subirait le contrecoup. Côté français, il y aurait une perte d’accès privilégié à un fournisseur d’énergie et à des marchés d’infrastructures où les groupes français sont encore très présents. Côté algérien, les perturbations des importations sensibles (équipement, pharmacie, biens de consommation) et de la logistique augmenteraient en l’absence de liens directs. Mais Alger a des options de repli : elle pourrait intensifier ses alliances avec la Chine, la Turquie, l’Italie, l’Allemagne, le Brésil ou les États-Unis, et rediriger ses ventes d’hydrocarbures, un levier que Paris n’a pas de manière symétrique.

Perte d’influence : la plus grande amertume pour Paris

Au-delà des chiffres, c’est la politique qui est en jeu. Pour la France, voir une relation aussi essentielle que celle avec l’Algérie se déliter sonnerait comme un revers stratégique : un déclin de l’influence en Méditerranée, un affaiblissement du réseau culturel et diplomatique, et un rétrécissement de son « pré carré ». L’Algérie subirait des frictions réelles — humaines et logistiques — mais pourrait transformer cette crise en une diversification accélérée de ses alliances et de ses fournisseurs.

Washington, Pékin, Moscou, Rome, Madrid, Berlin à l’affût

Une rupture entre Paris et Alger ouvrirait un couloir d’opportunités pour d’autres acteurs.

États-Unis : fourniture de technologies, d’énergie et d’équipements de sécurité, et augmentation de la coopération militaire, tout en s’assurant un point d’appui aux portes de l’Europe.

Chine : renforcement de sa position déjà forte dans les infrastructures, l’industrie et le financement, et image d’un partenaire « fiable » face à une Europe froide.

Russie : consolidation des liens énergétiques et militaires avec Alger, et capacité à peser davantage sur le flanc sud de l’OTAN.

Qui « gagne » à ce bras de fer ?

À court terme, personne. La rupture pénaliserait les deux sociétés et perturberait les chaînes économiques. Cependant, à moyen et long terme, l’asymétrie est claire :

-Gagnant politique probable : l’Algérie, grâce à son poids énergétique, sa profondeur stratégique et sa capacité à se tourner vers d’autres pôles de pouvoir.

-Perdant durable : la France, qui verrait une relation structurelle s’éroder sans substitut équivalent.

-Gagnants collatéraux : les États-Unis, la Chine et la Russie, qui avanceraient leurs pions dans un espace méditerranéen reconfiguré.

Ce scénario extrême révélerait une vérité simple : dans une relation rendue inégale par l’histoire mais aujourd’hui rééquilibrée par la géo-économie, la rupture n’est plus synonyme d’isolement pour Alger, alors que pour Paris, c’est le risque d’un désengagement d’influence difficilement réversible. Entre l’ancien colonisateur et l’ancien colonisé, la logique de la dépendance s’est inversée : celui qui peut rediriger ses flux gagne du temps et du terrain. Quant aux États-Unis, ils n’auront qu’à se servir de ce que leur offrira la discorde trans-méditerranéenne.

Mel Kam

Source : Facebook

#Algérie #France

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