L’Iran et le Niger ont signé un accord de coopération en avril 2025, signe que l’Iran souhaite profiter de l’expulsion de la France de ses anciennes colonies (Burkina Faso, Tchad, Niger). Ces ambitions restent floues car aucune déclaration officielle n’a été faite. Cependant, toute initiative dans le Sahel occidental, qu’elle soit économique ou militaire, a ralenti. Le conflit avec Israël épuise les ressources des deux pays qui auraient pu être destinées à l’Afrique.
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L’Afrique évalue l’impact du récent conflit sur ses intérêts économiques et sécuritaires, qui ont été bouleversés par un affrontement entre deux de ses alliés, l’Iran et Israël. Bien qu’aucun de ces pays n’ait une forte présence en Afrique, tous deux souhaitent renforcer leurs liens. Ces ambitions sont mises en pause alors que leur confrontation militaire se poursuit.
Une attaque surprise d’Israël contre des installations militaires et nucléaires iraniennes le 13 juin 2025 a déclenché la dernière escalade au Moyen-Orient. L’Iran a répliqué par des attaques de drones et de missiles ayant réussi à percer les défenses israéliennes, faisant plusieurs victimes. Les accords de cessez-le-feu ont été rompus, et aucune fin aux hostilités n’est en vue. Comme pour tout conflit international, les pays éloignés du champ de bataille considèrent les conséquences économiques et diplomatiques possibles. Pour l’Afrique, les considérations énergétiques et maritimes sont les plus préoccupantes.
L’Afrique du Nord surveille de près les conflits du Moyen-Orient
Un bloc d’intérêts communs composé de pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord, appelé MENA, étend l’influence du Moyen-Orient jusqu’à l’océan Atlantique. Malgré ces liens, l’impact du conflit varie selon les pays d’Afrique du Nord.
L’Égypte est celle qui souffre le plus de l’éclatement des hostilités entre l’Iran et Israël. Israël a immédiatement fermé ses champs gaziers de Karish et Leviathan par précaution sécuritaire. Ces champs fournissaient 20 % des besoins en gaz de l’Égypte, et sans cet approvisionnement, un retour aux coupures d’électricité massives semble imminent. Cela entraîne également une résurgence des tensions économiques et sociales qui avaient menacé le gouvernement du président Abdel Fattah al-Sissi en 2024.
L’exportation de l’islam radical par l’Iran est considérée comme déstabilisante par de nombreux gouvernements africains, notamment l’Égypte. Par conséquent, Le Caire a renforcé ses liens avec Israël. Israël s’est également engagé dans une diplomatie active en Afrique subsaharienne. Bien avant l’Iran, Israël et d’autres pays MENA (Turquie, Arabie saoudite et Émirats arabes unis) ont accru leur présence économique et diplomatique en Afrique. En comparaison, seuls les chefs d’État de trois pays africains – le Ghana, l’Afrique du Sud et le Zimbabwe – se sont rendus à Téhéran.
La Libye et la Tunisie, ayant peu de liens avec Israël et l’Iran, ne connaîtront ni avantage ni inconvénient, quel que soit le vainqueur du conflit. L’Algérie, en revanche, pourrait gagner un allié puissant si l’Iran l’emportait, tandis que le Maroc verrait un adversaire se renforcer. L’Iran soutient le mouvement d’indépendance du Sahara occidental, que le Maroc considère comme son propre territoire. L’Iran a montré son intérêt pour la République arabe sahraouie démocratique et le Front Polisario, l’organisation politico-militaire sahraouie soutenue par l’Algérie. Historiquement, l’Algérie s’est opposée aux politiques d’Israël dans la région, notamment à sa participation aux forums panafricains. Cette position s’est renforcée depuis le rapprochement Israël-Maroc grâce aux Accords d’Abraham.
Pour l’instant, le conflit avec Israël accapare toute l’attention et les ressources de l’Iran. Au cours des deux dernières décennies, le Maroc a renforcé son contrôle sur le Sahara occidental, grâce à des succès diplomatiques en Afrique et ailleurs. Cela pourrait toutefois évoluer. En 2018, le Maroc avait rompu ses relations diplomatiques avec l’Iran pendant cinq mois pour protester contre son soutien à une révolte du Front Polisario.
Ailleurs en Afrique, les priorités sont en train de changer
En dehors des pays MENA, le principal effet du conflit Iran-Israël sur le reste de l’Afrique est la crainte de son potentiel déstabilisateur. Cependant, beaucoup de ces craintes ne se sont pas concrétisées.
Économiquement, les hausses massives des prix du pétrole redoutées ne se sont pas produites. L’OPEP a annoncé, le 5 juillet 2025, une augmentation de la production pour stabiliser les prix. L’éventualité d’attaques par des mandataires iraniens contre les actifs israéliens en Érythrée ou ceux des États-Unis à Djibouti ne s’est pas réalisée non plus. Le transport des marchandises africaines par la mer Rouge n’a pas été affecté, contrairement à la guerre Israël-Hamas de 2023. L’approvisionnement alimentaire, l’aide humanitaire et le commerce n’ont pas été perturbés.
L’impact principal est d’ordre diplomatique. Les gouvernements africains réévaluent leurs relations avec l’Iran et Israël, alors que les initiatives diplomatiques des deux pays en Afrique sont suspendues en raison des hostilités. Israël entretient des relations diplomatiques avec deux fois plus de pays africains que l’Iran : 40 contre 20.
La plupart des pays africains avaient rompu leurs liens avec Israël en 1973 lors de la guerre du Kippour, et ne les ont rétablis qu’au cours des 15 dernières années grâce à une diplomatie active de Jérusalem. Le Cameroun, la Côte d’Ivoire, le Rwanda et le Togo étaient les alliés les plus proches d’Israël. Toutefois, depuis la guerre Israël-Hamas en 2023, le soutien populaire africain à la Palestine – perçu comme une lutte de libération similaire aux guerres anti-coloniales africaines – a réduit l’influence israélienne sur le continent. En témoigne la plainte de l’Afrique du Sud contre Israël devant la Cour internationale de justice pour crimes contre l’humanité concernant des exactions présumées contre les civils palestiniens.
L’Iran a ouvert des centres religieux et culturels chiites aux Comores, à Djibouti, au Nigeria, au Sénégal et en Tanzanie. Son principal investissement économique porte sur l’extraction d’uranium pour produire du plutonium de qualité militaire. Ces projets sont en pause durant le conflit.
Parmi toutes les régions, l’Iran accorde le plus d’importance à l’Afrique de l’Est, en raison de sa proximité avec le MENA. L’Afrique est le principal espace d’expansion mondiale pour l’Iran, qui a peu de relations avec d’autres continents. Néanmoins, l’Iran a toujours adopté une approche ponctuelle, pays par pays, et n’a jamais formulé de politique africaine globale.
L’Iran et le Niger ont signé un accord de coopération en avril 2025, signe que l’Iran souhaite profiter de l’expulsion de la France de ses anciennes colonies (Burkina Faso, Tchad, Niger). Ces ambitions restent floues car aucune déclaration officielle n’a été faite. Cependant, toute initiative dans le Sahel occidental, qu’elle soit économique ou militaire, a ralenti. Le conflit avec Israël épuise les ressources des deux pays qui auraient pu être destinées à l’Afrique.
Points clés :
- Les hostilités Iran-Israël n’ont pas entraîné de perturbations majeures en Afrique
- L’influence iranienne souffre d’une approche désorganisée, avec seulement 20 ambassades contre 40 pour Israël
- Israël a perdu le soutien de nombreux pays africains, sensibles à la cause palestinienne
Source : Polity (Afrique du Sud)
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