Domination occidentale ébranlée ?

Topics : Dollar, Etats-Unis, BRICS, yuan, dédollarisation, échanges, Occident,

par Abdelkrim Zerzouri

Les pays émergents cherchent depuis quelques années à se détacher du dollar, à lui ôter ses privilèges dans leurs transactions commerciales, mais la monnaie US a gardé sa suprématie contre vents et marées. Mais avec la guerre en Ukraine, l’option en question a pris une dimension plus sérieuse, proche de la concrétisation, voire d’une concrétisation partielle quand la Russie a exigé, en réponse aux sanctions économiques décidées par les Occidentaux, le paiement des ventes de son gaz en roubles. Il y a un peu plus d’une année, la Chine, gros importateur de pétrole, et l’Arabie Saoudite, gros exportateur de pétrole, ont mis sur la table l’option de payer en yuans l’achat du brut saoudien. Il s’agit de quelques tentatives publiques de « dédollariser » le commerce de l’énergie et « modifier fondamentalement l’ordre économique et géopolitique mondial », selon une alerte lancée, en 2022, par le Fonds monétaire international (FMI). Les initiatives pour réduire la domination du dollar dans les contrats d’approvisionnement en pétrole dans le monde, qui contraint les pays acheteurs à dépendre de leurs réserves de change en dollar pour se fournir en hydrocarbures, ont commencé en 2016, et elles ont été conduites par les pays européens eux-mêmes, lorsque la France et l’Allemagne commencent à libeller des contrats pétroliers en euros dans le cadre du programme pétrole contre nourriture, visant soi-disant à satisfaire les besoins humanitaires du peuple irakien suite aux sanctions économiques décidées par l’ONU contre ce pays.

Toutefois, le dollar est resté maître dans les transactions sur le marché pétrolier mondial grâce au penchant fort des pays exportateurs de pétrole pour l’achat massif des bons du Trésor américains. Pour dire que le dollar a gardé sa puissance en se collant aux contrats d’approvisionnement en pétrole, en majorité libellés en dollars, et c’est à travers un changement sur ce plan, soit l’abandon du dollar par les pays exportateurs de pétrole dans leurs transactions commerciales, qu’on peut sérieusement entamer une modification de l’ordre économique et géopolitique mondial.

Et, ces derniers temps, il y a le groupe des Brics qui monte en puissance et affiche clairement une volonté de lancer une monnaie alternative au dollar. Se dirige-t-on vers l’instauration d’une monnaie unique des Brics, qui s’inscrit en fait dans ses gênes ? La relance de la nouvelle banque de développement (NBD) des Brics, avec à sa tête l’ancienne présidente du Brésil (élue en mars), s’inscrit dans cette logique, mais la mise en place d’une monnaie unique des Brics pourrait s’avérer lourde, devant passer, entre autres étapes, par la création d’une Banque centrale et l’harmonisation des règles pour ce marché commun, à moins de passer directement à la monnaie numérique (cryptomonnaies), alors que la « dédollarisation » dans leurs transactions commerciales est une mesure qu’on peut appliquer aisément, en recourant simplement à l’utilisation de leurs monnaies nationales, ou une monnaie de l’un des pays membres. La domination occidentale ébranlée ?