Panzeri : La visite de Tindouf pour éloigner les soupçons

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Tous les liens entre Panzeri et le Maroc. Une histoire qui dure depuis 11 ans – Corriere.it – .

Par Giuseppe Guastella, correspondant à Bruxelles
Qatargate, le voyage à Tindouf organisé par Rabat en 2011 pour « crédibiliser » le député européen arrêté à Bruxelles.

Depuis au moins onze ans, le Maroc considère Antonio Panzeri comme un ami important et précieux. Consolidés au cours de ses deux mandats au Parlement européen, les contacts se sont poursuivis de manière encore plus intense depuis 2019, lorsque Panzeri a fondé l’ONG Fight Impunity. Un lien qui, avec le temps, est devenu trop étroit, comme celui qui existe avec l’État du Qatar. Tous deux ont envoyé Panzeri et d’autres personnes en prison, accusés d’avoir collecté de l’argent et de l’avoir blanchi dans le cadre d’une conspiration criminelle visant à la corruption et au blanchiment d’argent qui avait pour but de conditionner les choix politiques du parlement aux intérêts des deux États.

Une enquête des journaux Le Soir et Knack reconstitue la relation avec le Maroc à partir du moment où Chris Coleman, un hacker au nom anglo-saxon mais à l’identité marocaine, a mis en ligne une série de documents confidentiels de Rabat entre 2014 et 2015. Il s’agit notamment d’une note diplomatique d’octobre 2011 envoyée depuis Bruxelles, dans laquelle un contact aurait eu lieu entre un représentant de la mission marocaine auprès de l’UE et l’ancien eurodéputé italien. Il a été rapporté que lors d’une réunion informelle en marge d’une session plénière du Parlement à Strasbourg, le « conseiller » de Panzeri avait apporté un message à envoyer aux « autorités marocaines ».

Il s’agissait peut-être d’une démarche tout à fait normale dans le cadre du travail d’un assistant parlementaire, tant il est vrai que la note était destinée à préparer la visite que devait effectuer deux semaines plus tard à Rabat M. Panzeri, alors président de la Commission Maghreb du Parlement. Mais il y a plus, les Marocains ont pris soin de ne pas mettre dans l’embarras le parlementaire de l’époque qui, peut-être par choix, a dû s’arrêter dans une zone où se trouvaient des camps de réfugiés sahraouis avant d’être transféré à Rabat : « La visite de Tindouf est fondamentale pour renforcer la crédibilité de Panzeri auprès de l’Algérie et du Polisario » (le mouvement actif au Sahara occidental) qui, autrement, l’auraient considéré comme trop pro-marocain, explique le document.

Dans une autre note, datée de 2013, la même mission diplomatique auprès de l’UE a annoncé un plan pour contrer les opposants du Maroc au Parlement avec des conférences, des débats et des visites en coordonnant son « action avec le président de la délégation Maghreb au PE, Antonio Panzeri, un ami proche du Maroc ». Depuis 2019, les plaintes sont passées des bureaux du Parlement à ceux de Fight Impunity et, du moins selon la justice belge, à partir du 1er janvier 2021, elles deviendront une affaire pénale. Panzeri, en effet, aurait eu trop de relations avec l’ambassadeur du Maroc en Pologne, Abderrahim Atmoun, un personnage qui fréquenté un centre d’études à Bruxelles dans l’ombre duquel les services secrets de Rabat auraient opéré.

Panzeri, sa femme et sa fille avaient également l’intention de transférer certains cadeaux qu’ils avaient reçus au Maroc par l’intermédiaire du diplomate. Les enquêtes du parquet fédéral font état de plusieurs rencontres entre les deux hommes et de récents voyages effectués par Panzeri au Maroc. Des accointances suspectes ont également été enregistrées entre Atmoun et l’eurodéputé PDP (aujourd’hui démissionnaire du groupe) Andrea Cozzolino. Il y a ensuite le fil des liens avec le Qatar, qui remontent toutefois à une époque beaucoup plus récente. Les magistrats se concentrent en effet sur un voyage effectué par Panzeri dans le pays du Golfe début novembre. Là aussi, selon l’accusation, le but était d’obtenir une politique favorable dans le pays. Notamment dans le débat sur le respect des droits de l’homme et des travailleurs pendant la préparation de la Coupe du monde.

Lundi, la femme et la fille de Panzeri, arrêtées dans la province de Bergame à la demande des enquêteurs de Bruxelles, comparaîtront devant la Cour d’appel de Brescia, qui devra décider de leur transfert éventuel en Belgique. Parallèlement, les enquêtes menées en Italie sur les avoirs de la famille Panzeri – mais aussi sur les comptes des Italiens directement impliqués, comme Francesco Giorgi, le compagnon de l’ancienne vice-présidente du Parlement européen Eva Kaili – ont déjà permis d’identifier des sommes « énormes ». Dans leur demande de remise des deux femmes à la Belgique, les magistrats bruxellois demandent également d’entendre des témoins et d’identifier tous les documents utiles à l’enquête ainsi que d’autres personnes impliquées « dans cette organisation frauduleuse ».

Source , 17 décembre 2022

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