Naissance d’Orangina à Boufarik (Algérie) en 1935

Nous sommes dans les années vingt. L’Algérie se couvre d’orangeraies. Et c’est en visionnaire que Léon Béton, qui élabore et commercialise des huiles essentielles de lavande et de géranium, rassure les agriculteurs de sa région en quête de débouchés pour leurs fruits. Un voyage à la foire de Marseille, à l’automne 1935, va mettre fin à leurs lamentations : Léon Béton rapporte à Boufarik, petite ville de la plaine de la Mitidja au sud d’Alger, la fameuse formule, fruit de sa rencontre avec un pharmacien de Valence.

Le docteur Trigo Mirallès vient en effet de mettre au point un concentré de jus d’orange, appelé Naranjina («petite orange» en espagnol).

La bouteille, composée d’un flacon ventru, contient du concentré d’orange et est surmontée, en guise de bouchon,d’une fiole renfermant de l’huile essentielle d’orange.

C’est ce mélange, additionné d’eau sucrée puis gazéifié, que le Dr Trigo baptise « Orangina, soda de Naranjina », en 1936.

Cette année-là, le produit, déjà enfermé dans une bouteille granuleuse et ventrue comme une orange, est présenté à la foire d’Alger. 1937 : le Dr Trigo vend sa recette à Léon Béton, qui commercialise le produit en Algérie avec un succès immédiat. Un succès interrompu par la guerre d’Espagne, d’où est importé le concentré, puis par la Deuxième Guerre mondiale.

C’est à Jean-Claude Béton, jeune ingénieur agricole qui a repris les activités de son père en 1947, que l’on doit la concrétisation des projets de Léon Béton. Chargé de l’exploitation de la marque Orangina pour la France et ses colonies, il fonde en 1951 la Compagnie Française des Produits Orangina (CFPO) et la dirige jusqu’en janvier 1990 . Le 23 janvier 1951, Naranjina Nord-Afrique sort ses premières fabrications dans l’usine de Boufarik, offrant enfin leur débouché aux orangeraies de la région.

1956, Jean-Claude Beton installe la Société Rhône Orangina à Marseille. Dès les années 50, les petites bouteilles jaunes commencent à fleurir sur les tables des cafés français. Ce sera d’ailleurs le premier terrain de conquête de la petite bouteille ventrue qui veut avec son goût d’orange faire durer l’été toute l’année.

Les jus proviennent toujours d’Algérie et sont acheminés au début dans des fûts de châtaigniers avant d’être mis en bouteille (ronde !) et consignée dans les cafés. À l’époque, la forme ventrue et granuleuse de la bouteille (évoquant le fruit de l’oranger), est boudée par les cafetiers : elle est un handicap par rapport au petit volume des réfrigérateurs. Beton persiste et signe par des slogans bien sentis, pour souligner la personnalité hors norme de la petite boisson. « Orangina mieux qu’un soda » trouvé par Jean Giraudy. Elle devient aussi « Source de santé », « source de beauté ». Avec un sens du marketing inouï, il réquisitionne des employés ou des étudiants embauchés pour l’occasion, pour commander des Orangina dans les cafés. Les soldats revenus d’Algérie rapportent eux aussi cette mode en métropole…

Autre coup de maître, c’est la rencontre avec Villemot dès 1953. Ce dernier dessinera 17 affiches avec l’écorce d’orange en vedette qui se fait tour à tour chapeau de paille, visage, parasol, bouclettes de cheveux, soleil ou maillot de bain… et proposera le fameux « Secoue-moi » et une campagne qui fera date. La célèbre « réclame » à l’époque du tic du Barman fait un carton. Entre-temps, en 1961, suite au développement du produit en métropole, Naranjina Nord-Afrique est transformée en Compagnie française des produits Orangina (CFPO) dont le siège social est établi à Marseille. La saga poursuit en direct de Phocée sa folle épopée. Orangina, au début installé au 147 rue de Crimée, déménage pour Vitrolles et y implante le centre de concentrés de jus d’agrumes puis aux Milles. La marque est aussi l’histoire d’une innovation permanente. Car elle ose tout avant les autres. Elle a été la première à lancer le light en 1988 en France avant les décrets d’application. Elle a également été la première à utiliser les canettes fabriquées à côté de Lyon.

En janvier 1985, un accord est signé avec une autre société marseillaise, Pernod Ricard qui doit mettre en bouteille. Les années 80, c’est aussi l’âge d’or d’Orangina qui cartonne avec la fameuse Lambada. Les meilleures ventes dans toute l’histoire de la marque s’échelonnent d’ailleurs sur les quatre années qui suivent la lambada. Orangina a donc toujours aimé innover.

Elle fut la première entreprise à coproduire une émission de télévision sur une chaîne d’État en supportant le générique du show de Stéphane Collaro « Cocoricoboy ». Par la suite, elle devient sponsor pour des événements sportifs comme le Tour de France à la voile en 1987, présente aussi à Roland Garros lors de la victoire de Yannick Noah, ou dans les stations estivales ou de ski. Avec toujours en tête cette relation directe avec le public. Orangina part à la conquête des réfrigérateurs.

Le divorce avec la famille Beton

De grands talents ont signé des campagnes de pub qui ont marqué les esprits de nombreuses générations. Michel Berger et sa mélodie « O-ran-gi-na ». Impossible d’oublier la saga des hommes bouteilles d’Alain Chabat en 1994. En 2003, le slogan de la marque devient « Orangina et sa pulpe ! » avec une campagne publicitaire conçue et jouée par Jamel Debbouze.

Mais le divorce avec la famille Beton est prononcé en 2004 comme l’explique Françoise Beton, la fille de Jean-Claude. « Depuis le rachat par Schweppes, l’esprit, l’ADN de la marque n’y est plus. Ce n’est pas le même état d’esprit. Maintenant les choses ont évolué avec la nouvelle équipe mise en place autour de Thierry Gaillard (PDG) et de Stanislasde Gramont (directeur Europe). » La famille Beton, elle, s’occupe du vignoble Château Grand Ormeau Lalande-Pomerol acheté en 1989. Une partie de la boucle est bouclée puisque Françoise Beton retourne vers la terre et la culture. Non pas celle des oranges certes mais du vin.

« C’est vrai que je n’y suis plus mais je la vis cette marque ! Les gens sont attachés à cette bouteille boule en verre, cette notion de secouement, cette pulpe. C’est devenu un geste culte, un rituel. Le génie de Léon et Jean-Claude Beton est d’avoir fait de cette marque un produit, reconnaissable en quelques signes par le consommateur. Son identité est tellement forte qu’il faut à peine une seconde pour reconnaître la marque. »

Source Archives et article de Agathe Westendorp(La Provence .com)

voir :Article__La_Provence_Orangina

Source : Algerazur

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