La fin de l’empire de l’homme le plus mystérieux de l’ Algérie

La Vanguardia, 25 sept 2019

Alger, 25 septembre (EFE) .- Le général Mohamed Lamine Mediene, surnommé « Tawfik », est l’une des personnalités les plus énigmatiques et les plus importantes du régime hermétique algérien. Directeur des services secrets (DRS) pendant un quart de siècle, a été condamné à quinze ans de prison pour « complot ».

En prison provisoire depuis le début du mois de mai, à l’âge de 79 ans il a été accusé par la justice militaire de « conspiration contre l’autorité de l’État » et « attentat contre l’autorité militaire ».

A côté de lui et partageant le banc et la sentence, le frère du président algérien démissionnaire Abdelaziz Bouteflika, Said Buteflika; son successeur à la tête du DRS, Athmane Tartag et l’ancienne cheffe du Parti des travailleurs, Luisa Hanoune.

C’est un personnage presque anonyme, il n’y a pratiquement aucune photo de lui et peu d’informations sont connues sur sa vie privée. On dit qu’il est un amoureux des cigares et passionné de football, qu’il travaillait beaucoup et parlait peu. C’est ainsi qu’il a réussi à créer un empire autour de sa personne, au point de créer un État au sein de l’État.

Né en 1939 dans la ville de Guenzet, dans la région de la Kabylie, il a rejoint l’Armée de libération nationale (ALN) durant sa jeunesse dans sa lutte pour l’indépendance du pays.

Après la fin de la guerre en 1962, Mediene intègre ce qu’on appelle la promotion « du tapis rouge », une formation à l’école du KGB, les services de renseignement soviétiques.

De retour dans le pays, il a occupé divers postes dans la sécurité militaire, mais c’est pendant le mandat du général Chadli Bendjdid (1979-1992), avec qui il a noué des relations étroites, qu’il a réussi à occuper le poste qu’il a su convoité à la tête de l’agence d’espionnage.

À la fin de 1991, avant la victoire imminente du Front islamique du salut (FIS) aux élections législatives, Mediene décida de lancer une campagne « d’éradication » contre le mouvement islamiste avec plusieurs généraux et organisa un coup d’État.

C’est ainsi que commence l’un des chapitres les plus dramatiques de l’histoire de l’Algérie, connu sous le nom de « décennie noire ». La guerre civile a coûté la vie à environ 300.000 personnes et laissé plusieurs milliers de personnes disparues jusqu’à l’arrivée d’Abdelaziz Buteflika en 1999.

Sa relation avec le premier président civil serà caractérisée par des va-et-vient. Tandis que le DRS tente de maintenir le palais présidentiel du Mouradia sous sa tutelle, Bouteflika tente de l’envoyer à la caserne et de le tenir à l’écart de la politique.

Malgré tout, les amis ennemis parviennent à trouver un équilibre d’immunité réciproque.

En 2004, « Tawfik » soutient la réélection du dirigeant et, en 2008, son initiative de révision de la constitution qui limite les mandats présidentiels à deux législatures de cinq ans afin de rester au pouvoir.

En automne 2015, le régime annonce par surprise la cessation du général alors que son nom sonne alors comme l’un des successeurs possibles du président et est remplacé par le général Athmane Tartag dans une série de purges dans l’appareil de sécurité. .

Depuis la démission de Bouteflika en avril dernier, le chef de l’armée et nouvel homme fort du pays, le général Ahmed Gaïd Salah, ont lancé une campagne « des mains propres » contre la corruption.

Des militaires, des politiciens, des ministres et des hommes d’affaires proches du clan présidentiel sont envoyés en prison; ce qui remet en question l’indépendance du système judiciaire et laisse penser plutôt à un réglement des comptes par le cercle actuel du pouvoir. EFE

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