Est-il possible de vivre au Maroc de son art ?

ABDERRAHMANE ZENATI

Sa langue maternelle c’est le dialectale marocain, il écrit ses ouvrages ( 63 édités) en langue de Molière… Pourtant, il n’a jamais, au grand jamais était en classe!…

Né le 14 juillet 1943 dans un milieu frôlant la misère, orphelin de père à l’âge de cinq ans, dès l’aube de son enfance, il se retrouva abandonné dans l’enfer de la rue, livré à lui-même, comme Gavroche de Victor Hugo et Rémi d’Hector Malot.

Au grès de ses pas, ventre affamé et tremblant de froid, il erra durant des années dans les rues et les terrains vagues. « Pour survivre, je mangeais n’importe quoi, en fouillant dans les poubelles, parmi les chiens et les chats, dit-il dans son ouvrage « Goût de cendre ». L’enfance triste et déchirée d’Abderrahmane Zenati n’a été bercée que par les rêves et les contes que lui narrait cheikh Tayeb, un vieux conteur populaire de “halka”.

A force de vivre dans la misère et la saleté, à douze ans, la tuberculose lui perfora les poumons et le cloua dans un lit de l’unique hôpital d’Oujda. C’est là, face à la bonté des infirmiers et aux discussions profondes avec les malades, qu’il a pris conscience de la réalité de sa vie. Tous ces échanges variés lui faisaient vivre intensément un espoir à travers l’humain de chacun. Lui, qui, jusque-là, ne se souciait seulement que de manger pour survivre l’heure présente, la pensée de savoir de quoi son lendemain serait fait, avait soudain germé dans ses pensées. Et seul, par instinct, il se mit à gribouiller avec des crayons de couleurs des dessins sur n’importe quel papier lui tombant sous la main.

Grâce à une boite de gouache offerte par l’infirmière française, madame Michèle, avec passion il s’initia à la peinture et puis, bientôt à la lecture à l’écriture. A dix-huit ans, grâce à l’appui du docteur Sauvaget, un ancien médecin militaire, chef de l’hôpital d’Oujda, il fut recruté comme aide soignant à la Santé Publique.

ŒUVRES DÉJÀ PARUES DU MÊME AUTEUR :

Les Cigognes reviendront-elles à Oujda ?

Mémoire de la Fourmi.

Vol de la Fourmi.

La Déchirure.

L’Aube des Maudits

Le retour du bigame

Marjana

La seconde épouse

La maison en face

Tamoula

Paroles de fous

Al hogra

La Vallée des Oliviers

Un Homme Simple

Paroles Étranglées

L’Homme en Colère

Adieu Oujda, ma bien-aimée

L’Homme d’Amérique

Mon ami Tchita le juif

De la Haine en Héritage

Confidences d’un âne de l’Oriental

Haffou le fou

La Malédiction d’Allah

Le Vent de l’Est s’arrête à Figuig

Un Homme Presque Parfait

Ces hommes fous de l’Oriental

Des Mots à la place du pain

Le Fou de Sarah

Le Chemin de l’Enfer

Khalti Fatna

La Vallée Oubliée

Goût de cendre

Crépuscule des Anges

Nous n’irons pas tous au Paradis

Le cri de l’agneau

Merguez et Harissa

Grain de sable

Un dimanche à Saïdia

Le mal de l’absence

L’œuvre de Abderrahmane Zenati est chargée de cet optimisme qui est indispensable au développement de la création. Certains se demandent: Zenati est-il peintre ? Est-il écrivain ?… Il est les deux à la fois… Et ce fait le porte au sommet de son art et de sa création. Comme tous les artistes du monde, cet artiste marocain est un résistant, c’est un défenseur de la liberté créatrice. Réalisme dans ses écrits et utopie fantaisiste dans ses peintures guident sa main. Il est toujours pressé. Il peint vite et il écrit vite. 63 ouvrages édités et des centaines de toiles à travers le monde. ” Il y a tant de choses à peindre, à écrire et la vie est si courte”, dit-il souvent.

Abderrahmane Zenati a tout pour être le leader des artistes peintres dans sa région du Maroc Oriental. Il fut le premier à exposer ses ouvrages dès les années 50. Et puis il possède le don et une volonté de fer. Quand on a la chance de pouvoir le regarder peindre, il nous semble que tout ce qu’il réalise est facile. Il travail avec aisance et adresse surprennentes. Pudique, assez timide, il est beaucoup plus à l’aise dans la solitude de son atelier que dans une performance en public…” (Florence Jobert)

L’oeuvre de Abderrahmane Zenati s’inscrit entre l’Art brut et l’Art contemporain. Cet autodidacte marocain a l’audace dans le trait, dans la forme et les couleurs. Il a la spontanéité dans les idées, dans les histoires qu’il nous raconte à travers ses nombreux ouvrages. C’est un peintre narratif. Sa source d’inspiration, c’est sa propre vie, c’est sa grande culture, où il puise ; mythologies, revues et corrigées par ses soins ; histoires populaires de son enfance, de son pays. Il peint avec une fougue guerrière (Charles Gautier)

Abderrahmane Zenati peut passer du figuratif à l’abstrait… Les deux styles seront chargés de tendresse, d’amour. Regardez cet artiste dans les yeux. Vous verrez, il aime vous écouter, il aime discuter avec vous… Il vous aime !

Abderrahmane Zenati aime la vie, aussi cruelle soit-elle pour lui à certaines moments. Il aime sa famille, ses amis et son public comme il aime l’Art. Il aime raconter l’histoire de sa ville, de son pays… il aime se raconter. Ecoutez-le et il vous fait voyager dans le temps, son imagination éclate, déborde, éclabousse …Il vous télescope dans la vie de ses personnages d’hier et d’aujourd’hui… Je pourrais noircir des pages et des pages sur Abderrahmane Zenati et son oeuvre, tellement il m’avait surprise, étonnée, ce fut comme un coup de foudre… Je suis sûr que Abderrahmane Zenati, à travers ses créations, il nous étonnera encore et encore, si Dieu lui prête vie …(Fatima-Zohra Byad)

A la question « Est-il possible de vivre au Maroc de son art ? » posée récemment par un journaliste lors de sa visite à mon atelier, j’ai donné la réponse suivante :

« Rares sont les artistes-plasticiens qui vivent chez nous de leur art ;spécialement à Oujda où la majorité des artistes ont souvent recours à d’autres activités pour subvenir à leurs besoins, c’est en général l’enseignement qui est choisi. Mais pour qu’un jour l’artiste puisse vivre de son art, il faut d’abord penser à la création d’un marché artistique qui soit bien structuré et qui puisse faire appel aux hommes d’affaires qui devront investir dans l’art comme ils investissent dans d’autres secteurs économiques : l’art doit faire partie du circuit économique du pays.

Faute de quoi, l’artiste doit compter sur ses propres moyens. il faudrait éventuellement, encourager les artistes par l’acquisition de leurs ouvrages par le ministère de la culture lors d’une exposition personnelle ou collective, ce qui n’est pas le cas actuellement ! et comme aucune subvention de l’Etat n’est accordée aux artistes, il faudrait désormais impliquer d’autres bailleurs de fonds (banques, assurances…

L’artiste- plasticien ne pourrait vivre de son art qu’en présence d’un marché artistique légal et bien structuré. Cependant, on ne doit pas nier le fait que certains artistes, reproducteurs d’œuvres traditionnelles destinées au secteur touristique (œuvres sur la Médina, fantasia ou folklore marocains), peuvent tirer profit de ce commerce à partir de la reproduction d’œuvres anciennes qu’un touriste considère comme exotiques et qui n’offrent pas forcément la vision de créativité et de fécondité artistique exigée. Il s’agit là d’une vision plutôt unilatérale de l’art.

Mais quand on parle de plasticiens professionnels qui s’intéressent essentiellement à la valeur universelle et réelle de l’art et qui cherchent à suivre les nouvelles tendances dans le domaine, à rénover et à révolutionner le courant artistique, ceux-là ont encore des difficultés à faire connaître leurs œuvres et à trouver sur le marché local des acquéreurs qui s’intéressent vraiment aux nouvelles expériences créatrices avant-gardistes

Source : Peinture Zenati

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