Algérie : Et maintenant, après le huitième vendredi de mobilisation?

Oui et maintenant que le peuple algérien est sorti massivement dans toutes les willayas du pays pour dire bruyamment son rejet de Bensalah comme Président, Bedoui comme Premier ministre et naturellement l’élection présidentielle qu’ils prévoient pour le 4 juillet prochain ?

Le verdict rendu hier par des millions de citoyens sur un ton ferme mais dans une ambiance pacifique, ne fait pas l’ombre d’un doute. Plus que jamais, les algériens ne s’inscrivent plus dans l’agenda du pouvoir fut-il soutenu par l’état-major de l’armée.

Pour la huitième fois de suite, la mobilisation citoyenne ne faiblit pas malgré la fermeture des «frontières» de la capitale aux manifestants en provenance d’autres régions du pays.

La répression policière à coup de gaz lacrymogène et de canons à eau, le quadrillage de tous les accès à Alger ainsi que le filtrage de tous les axes routiers et autoroutiers n’ont pu entamer la volonté des centaines de milliers de personnes à forcer le barrage.

Et comme il fallait s’y attendre, le chef d’état-major de l’armée, Ahmed Gaid Salah qui a soutenu l’option Bensalah en tournant le dos aux revendications du peuple, a été copieusement arrosé de slogans hostiles. «Les généraux ne représentent pas l’armée ! » proclame notamment une banderole, avec la photo de Gaid Salah barrée du rouge, et bien en vue devant la Grande Poste.

Mais c’est le nouveau chef de l’Etat, Abdelkader Bensalah qui a ravi la «vedette» en termes de noms d’oiseaux et autres quolibets. Il était aisé de saisir politiquement le message du peuple algérien au-delà des foules qui étaient au rendez-vous.

La feuille de route déclinée autour des trois «B» Bensalah, Bedoui et Belaiz soutenu par Gaid Salah pour mener la transition politique est perçue par les manifestants comme un recyclage du Bouteflikisme sans Bouteflika.

L’immense mobilisation constitue déjà une réponse claire que le peuple est déterminé à ne rien lâcher tant que les trois «B» trônent à la tête des institutions.

De fait, la seule voie constitutionnelle choisie par le chef de l’armée pour régler la crise politique est catégoriquement rejetée par le peuple. Ce dernier a crié haut et fort qu’il ne quitterait pas la rue tant que sa principale revendication à savoir la restauration de sa souveraineté en vertu de l’article 7 de la Constitution n’est pas satisfaite.

Encore une fois, il renvoie la balle dans le camp du commandement de l’armée pour lui signifier que les solutions proposées ne sont que des diversions destinées à réinstaller le système avec de nouvelles têtes.

La démonstration de force populaire d’hier dans les quatre coins du pays constitue une piqure de rappel à l’état-major que les algériens qui ont usé leurs chaussures depuis le 22 février, ne se suffiront pas de demi mesures et encore moins de fausses mesures. Leur message sera-t-il reçu cinq sur cinq? Réponse dans quelques jours.

Imane B.

L’Est Républicain, 13 avr 2019

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