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L’Algérie n’est pas une monarchie mais a son Machiavel

Les Algériens transforment l’hiver ambiant en printemps des refus. Ils ne font rien comme les autres. La condition sociale y est sûrement pour quelque chose mais ils ont cette conscience que peu de peuples ont : choisir leur candidat et avec lui leur destin.

Peu importe la cause, c’est un peuple influent, c’est un peuple qui compte.

Tous les peuples comptent par leur géographie, par leur histoire, par leurs cultures, par leur démographie ou par tout autre ingrédient créateur d’Histoire.

Et bien plus.

De la révolte de Takfarinas, celle de Frimus, révolte berbère conduite par la reine Kahena, révolte kharidjite de Maysra à l’ouest jusqu’au Chelif, révolte kharidjite anti-fatimide d’Abu Yazid, révolte des Béni Abbès, alliés des ottomans par le passé, révolte des corsaires, révolte populaire contre l’impôt, les multiples résistances aux attaques des dynasties marocaines notamment pour l’annexion de Tlemcen, victoire d’Abd el-Kader à la Macta, …et la révolution de 1954.

On ne peut pas toutes les citer car ce peuple a forgé son identité dans le marbre des résistances séculaires.

Les temps modernes ne sont pas des moindres.

Pourquoi les puissants s’intéressent grandement à ce qui se passe en Algérie?

En France, le journal Le Monde fait religion surtout quad il s’agit de la relation avec l’Algérie. Il rapporte selon une source de presse algérienne, que les autorités du pays sont inquiètent de la situation de confusion politique qui règne en Algérie. Le Monde, qui s’est contenté dans un premier temps d’évoquer cette possibilité dans un petit article, est longuement revenu sur la “résignation de l’opposition” en Algérie.

En Afrique, le site Africanews indique que “détenteur du record de longévité à la tête de l’Algérie, le chef de l’État, visiblement diminué depuis son accident vasculaire cérébral en 2013, briguera un 5e mandat à la tête du pays”. La presse anglo-saxonne s’est limitée, pour l’instant, à rapporter les faits. Le Daily Mail, le Middle East Eye, ou encore les sites des grandes chaînes de télévision arabes ont rapporté les déclarations du secrétaire général du FLN, sans toutefois les commenter.

L’intox lobbyiste : Préparant l’après-Bouteflika, USA et Union européenne misent sur le nouvel Infitah, titre le mystérieux Washington Institute avant l’officialisation de la candidature de Bouteflika.

Une note d’un institut américain de 2017 prédit une « ouverture » en Algérie, en faveur des intérêts américains. Auparavant, un rapport français y voyait une « chance » pour l’Europe. USA et UE vont-ils conjuguer leurs efforts pour offrir à la recolonisation néolibérale le nouvel Infitah nécessaire au parachèvement de la révolution antisociale.

La note de Robert Satloff et Sarah Fauer deux politologues américains appartenant à un Institut contrôlé par le lobby pro-israélien AIPAC, ont inspiré ce matin le gros titre de la une de Liberté : « Selon une note du Washington Institute pour l’administration Trump Algérie : Le régime menacé dans ses fondements”.

Après avoir copié collé les habituels considérations sur le prix du pétrole, sur la maladie de Bouteflika, les mystérieuses intrigues et autres « incertitudes » de la succession, la note du duo américain va au concret : « Si les recettes en baisse de l’État limitent sa capacité à répondre au mécontentement populaire, les protestations croissantes pourraient ébranler les fondements du régime ». Puis elle montre le bout du nez : « Combiné à la disparition de la génération fondatrice de combattants de l’indépendance du pays, il peut exister des possibilités d’élargir la relation bilatérale pour répondre aux préoccupations communes ».

L’après-Bouteflika…

La note du duo américain apparaît comme un décalque du rapport parlementaire du duo français Teissier-Glavany. Les deux paires campent les espérances algériennes de leurs pays dans un décor de chaos. La différence réside dans les bénéficiaires de la mutation qui naîtrait de ce chaos. Pour le duo français, ce sera bien sûr l’Union européenne : « Les jeunes générations qui sont nourries désormais par la culture du monde (comprendre européenne, ndlr), ne peuvent se satisfaire d’une histoire purement nationaliste. L’arrivée d’une nouvelle génération de dirigeants, qui n’a pas connu les indépendances, est un défi mais peut être aussi une chance pour les relations entre l’Europe et le Maghreb »

Le duo américain, moins grandiloquent, pensent d’abord business, en appelant Trump à “jeter les bases d’une plus grande implication commerciale (…) afin de s’assurer que les entreprises américaines sont bien placées pour profiter de cette ouverture lorsqu’elle se produit”

Liberté ne mentionne pas la date de parution de la note du Washington Institute. Le 9 décembre dernier Robert Satloff et Sarah Feuer sont allés au Centre marocain des études stratégiques, sans doute dans le cadre de la préparation de leur note. Ils ont animé un débat sur le thème : « Le Président Trump, le Maroc et le Moyen-Orient : défis et opportunités» (1). Le journal marocain Le Matin rapporte : « Sarah Feuer a beaucoup insisté sur l’Algérie et les risques que pourrait générer l’après-Bouteflika, le Président algérien étant gravement malade. Cette situation est aggravée par la crise économique consécutive à la baisse des prix du pétrole ».

Le quotidien Liberté qui saute sur tous les sondages et classement défavorables à l’Algérie ne nous dit rien sur le Washington Institute. la structure actuelle du Washington Institut est mystérieuse sur le web. En 1991, le journaliste Mark H. Milstein avait enquêté sur les relations entre le Washington Institute et le principal lobby pro-israélien The American Israel Public Affairs Committee (AIPAC). Ce dernier contrôlait la présidence, la direction exécutive et la trésorerie de l’Institut. Où en est-on aujourd’hui ? Le site du Washington Institut ne mentionne que l’appartenance de son fondateur à la présidence du Jewish Federation Council de Los Angeles.

L’Algérie n’est pas une monarchie mais elle a son Machiavel !

Comme le note subtilement le Matin d’Algérie, je cite « comme le Prince de Machiavel, Bouteflika ne postule pas au pouvoir. Il est le pouvoir. Le pouvoir au sens où l’entend Machiavel : absolu et éternel. Celui obtenu par le clan d’Oujda en 1962, par la violence et le coup de force contre le gouvernement provisoire de la république algérienne (GPRA). Ce pouvoir dont il se dit le seul légataire après la mort de Boumediene : « J’aurais pu prétendre au pouvoir à la mort de Boumediene, a-t-il confié à Europe 1, mais la réalité est qu’il y a eu un coup d’Etat à blanc et l’armée a imposé un candidat », il parlait de la succession dans le cadre du clan. Il a ébahi le général Nezzar, en l’interpellant comme suit : «Boumediene m’a désigné comme son successeur par une lettre-testament qu’il a laissée avant sa mort. Cette lettre se trouvait à un moment donné aux mains d’Abdelmadjid Allahoum. Qu’est devenue cette lettre ? Je voudrais bien le savoir, car je l’ai vue cette lettre ! »

Alors «en politique le choix est rarement entre le bien et le mal, mais entre le pire et le moindre mal. »

Ça semble la devise de Abdelaziz de Bouteflika. Il est la stabilité et la sécurité. Il est pour ses partisans de moindre mal.

Car l’Algérie est le cœur battant d’une région en portail sur une Afrique subsaharienne devenue terre fertile aux semences brutales des retours des défaites d’Al-Qaïda de tout genre et de Daech.

Le pétrole y est pour quelque chose mais la digue entre le monde du nord en quête de sécurité contre le terrorisme, et le monde du sud qui même englué dans les guerres des faibles, victime de la bête immonde, il y’a les 2 millions de kilomètres carrés et une histoire d’un peuple expérimenté dans les résistances.

Les Occidentaux aiment le profil de Bouteflika. Il est autant machiavélique, donc despote que assoiffé avec son sens de dominer. Cette soif dans son ADN est celle qui s’éteint la dernière dans le cœur de l’homme.

Mais avec cet ADN, si l’Algérie s’éveille, le Maghreb tout entier tremblera sans aucun doute. Et ca sera fatal notamment à ceux qui guettent son désordre !

M. B.

Note

(1) http://www.cmes.ma/index.php/rencontres-et-debats/journees-d-etude/la-situation-securitaire-en-afrique-du-nord-2

Auteur

Mohamed Bentahar

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