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La nation Casher Nostra

Ici l’auteur étudie, entre autres, l’utilisation à des fins offensives de l’Holocauste comme outil de propagande.

« La ruse la plus astucieuse du Diable est de faire croire aux hommes qu’il n’existe pas. »

Citation attribuée à Charles Baudelaire

L’État juif d’Israël se définit comme un État « juif et démocratique », mais la dernière loi passée à la Knesset vise à ce que la « judéité » supplante la « démocratie ». Cependant, il apparait comme évident à toute personne qui n’est pas esclave des affabulations officielles que lorsqu’une minorité de la population est considérée comme nuisible, indésirable et ne fera donc jamais partie d’une coalition au pouvoir, la démocratie est la première victime à déplorer, surtout lorsque cette minorité est la seule victime d’un traitement discriminatoire et spoliateur, et ce malgré les sauts périlleux juridiques du plus grand des esprits juridiques juifs.

Extrait de Sionisme, judaïsme et l’État juif d’Israël : spécificité, unicité ontologique et morale juive, par Lynda Burstein Brayer, pour le blog du Saker, le 23 novembre 2018.

Résumé : Maintenant qu’il a annoncé des élections en avril, il semble que la motivation du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu pour les élections anticipées est d’éviter d’être inculpé pour corruption. Ayant toujours été un chanceux en politique, que tout le monde s’accorde à décrire comme ne manquant pas de culot, sa dernière manœuvre ne manque pas d’audace, même selon les standards déjà élevés de Bibi. Qu’il gagne ou perde (et on pourrait ajouter, qu’il soit coupable ou innocent), il y a peu de chance de voir une quelconque amélioration dans la façon dont Israël se comporte sur la scène internationale. Cela dit, le moment est propice pour observer de façon plus attentive cet État de plus en plus sûr de lui et dominateur, qui, comme son dirigeant actuel, a longtemps fait sa propre loi.

Voici une sorte de visite du Mur des lamentations par l’écrivain australien Greg Maybury.

Invoquer les horreurs du passé
Lors d’un discours écrit à la fin janvier 1970, et prononcé le 3 février de cette année (un jour avant sa mort) à une conférence internationale de parlementaires au Caire, dans lequel il notait que « le rôle traditionnel d’une puissance impériale est de consolider avec le moins d’efforts possibles ce qui a été acquis par la violence », le célèbre philosophe, historien et commentateur anglais Bertrand Russell eut ces mots à propos d’Israël :

Chaque nouvelle conquête devient la base nouvelle des négociations à venir, en position dominante, qui font fi des injustices commises lors de l’agression précédente. L’agression doit être dénoncée, non seulement parce qu’aucun État n’a le droit d’annexer des territoires qui lui sont étrangers, mais parce que chaque nouvelle expansion est un test visant à établir combien d’agressions supplémentaires le monde est disposé à tolérer… On nous répète souvent que nous devons compatir avec Israël à cause de la souffrance des Juifs d’Europe aux mains de Nazis. Je ne vois pas comment ceci peut être une excuse justifiant de faire souffrir d’autres peuples. Ce qu’Israël fait aujourd’hui ne peut être toléré, et invoquer les erreurs du passé pour justifier celles du présent est d’une hypocrisie sans nom.

Même pour un observateur neutre, la critique que faisait Russell du « seul État démocratique » du Moyen-Orient résonnait comme une condamnation accablante. Même s’il est vrai qu’il était révolté par le traitement des Palestiniens, la colère et l’indignation de Russell provenait principalement de la participation d’Israël dans le conflit majeur et décisif que fut la Guerre de six jours (et qui était toujours fraîche dans les esprits), même si peu de ses contemporains, voire personne, n’était dans la confidence quant à la réelle dimension de cette participation israélienne au conflit qui était en train de se dérouler.
Une telle évaluation du conflit est encore plus accablante lorsqu’on considère la réalité objective de la conduite d’Israël au cours des décennies qui suivirent, et ce que nous en avons appris depuis. Il ne se passe pas un jour sans qu’Israël essaie de déformer et de pervertir ce qu’il appelle « la réalité » ; c’est particulièrement flagrant dans son désir feint de paix au Moyen-Orient, où ses principaux éléments de langage sur le sujet sont pour le moins éloignés de la dite réalité. Dans les faits, Israël fait tout ce qui est en son pouvoir pour déstabiliser la région, comme il le fit dans la plus grande partie de son existence.

Dire que cette entreprise de déstabilisation fut un remarquable succès est un euphémisme : « L’armée la plus morale du monde ? ! ». Il faut un sacré culot pour inventer un slogan comme celui-ci ! Et pourtant regardez combien de commentateurs de la sphère des « perroquets » géopolitiques ont été convaincus par cette fable grotesque. En effet, bon nombre d’entre eux ont contribué, au cours des dernières décennies, à la création de cette fable, si bien qu’ils sont aujourd’hui les Gardiens du mythe, qu’ils doivent être tenus pour responsables des conséquences de cette fable, voire considérés comme des complices perfides de son invention et de sa préservation. Le pouvoir de cette fable est si extraordinaire que, si elle venait à s’effondrer ou simplement venait à être sérieusement remise en cause, ce pays cesserait probablement d’exister, en tout cas sous sa forme actuelle. C’est une réalité que les plus féroces défenseurs d’Israël ont sans aucun doute à l’esprit, mais que peu d’entre eux n’osent aborder dans leurs conversations de peur qu’elle devienne une prophétie auto-réalisatrice.

Nonobstant son statut d’« envahisseur-colonisateur-démocratique », Israël est dans tous les cas un État voyou, qui ignore régulièrement les normes contraignantes du droit international. En effet, n’importe quel autre État qui se conduirait dans l’arène internationale comme le fait Israël serait, dans un monde juste, considéré et traité comme un État paria.

Et pourtant l’étranglement que maintient Israël sur les opinions publiques au travers de son contrôle à la fois du Congrès et des médias américains est tel que la plupart des gens continue de considérer l’État d’Israël comme l’éternelle victime, la cible des autres nations, groupes, organisations et individus qui souhaitent dans le meilleur des cas nier sa légitimité (aussi bancale soit-elle), et dans le pire des cas le rayer de la carte. Un effort extraordinaire, et un certain génie collectif sont nécessaires pour parvenir à un tel objectif, aussi néfaste soit-il, que dis-je, démoniaque, de manipuler l’opinion publique internationale à un tel degré, et maintenir le joug si serré autour de cette fable au travers des décennies. Pour revenir à la citation de Baudelaire, ceci pourrait bien être « la ruse la plus astucieuse » d’Israël.

Vous n’êtes pas convaincus ? Vous voulez que je sorte la liste de Noël ? Aucun autre pays :

1. Ne bénéficie de façon aussi importante et fréquente des largesses des États-Unis et de son alliance avec l’Amérique (et l’Occident en général), ou n’obtient autant de cadeaux et autres passe-droits ;

2. Ne parvient, malgré sa taille modeste, à jouer dans la cours des grands en sachant se faire écouter de Washington, tout en redoublant d’efforts pour camoufler aux yeux des masses son influence et son pouvoir ;

3. Ne tire le maximum d’avantages du pouvoir financier et stratégique de son principal protecteur, et ce de façon si grossière et si souvent au service de ses propres intérêts et objectifs (et pas toujours de ceux de son protecteur) ;

4. N’est aussi efficace et si fortement engagé dans la restriction de la liberté d’expression et de tout débat, même rationnel et raisonnable, pour peu qu’il n’aille pas dans le sens de ses intérêts et de ses objectifs ;

5. Ne contrôle de façon aussi dissimulée et pourtant aussi omniprésente la « vision » des médias mondiaux et des débats publics et politiques qui forment le socle de l’opinion publique à son sujet ;

6. N’est aussi réfractaire, immunisé même, à l’approbation ou aux reproches de son principal protecteur et de la communauté internationale sur ses nombreux actes de délinquance, et encore moins aux conséquences d’une telle attitude ;

7. N‘espionne aussi régulièrement ni ne vole autant d’informations d’intérêts commercial et stratégique à son principal protecteur, pour les revendre à des rivaux voire des ennemis potentiels des États-Unis ;

8. Ne parvient à une telle schizophrénie entre l’image qu’il tente de se donner aux yeux du monde et la réalité de son attitude et de ses actions ; et

9. En l’absence de toute opposition sérieuse et concertée, est assuré de continuer à pousser ses pions vers son objectif, sans faire aucune concession et sans aucun respect des règles établies par la communauté internationale

Comment en est-on arrivé là ?
Étant donné la priorité systématiquement donnée à Israël par toute l’administration américaine confondue, démocrate ou républicaine, il est important de rappeler les actions de quelques uns des locataires de la Maison Blanche dont les relations avec Israël élucideront quelques-uns des thèmes abordés ici. Commençons par mentionner que ce ne fut pas toujours ainsi, en tout cas jusqu’à la présidence de Lyndon Baines Johnson (LBJ). Cela ne paraît pas évident de prime abord, mais peu de présidents de l’époque moderne ont légué à leur pays un héritage aussi important et durable que celui de LBJ. J’imagine que la plupart des citoyens pensent que la Guerre du Vietnam est le joyau de la couronne de l’héritage suspect légué par LBJ aux États-Unis.

Pourtant, selon moi, l’aspect le plus fondamental de l’héritage légué par LBJ, dès l’instant où il prit ses fonctions en novembre 1963, est son soutient inédit et total à Israël, un soutient qui a facilité, parmi tant d’autres choses, l’accès illégal d’Israël à l’arme nucléaire, tout en l’exonérant de toute clause de transparence et de responsabilité pourtant présente dans les traités internationaux de non-proliferation nucléaire. Nous reviendrons à la relation LBJ/Israël plus bas, mais tout d’abord un rappel utile d’Histoire contemporaine.

En 2018, 70 ans après que le président Harry Truman ait finalement cédé à la pression interne et externe (il était précédemment opposé à la notion d’un État juif en Palestine, et pour des raisons valides), et qu’il ait effectivement donné son feu vert aux Sionistes pour la création de l’État d’Israël, et ce à l’encontre de l’avis de nombreux acteurs dans les cercles diplomatique, politique et de la défense, la puissance phénoménale, l’influence et le contrôle de cette petite nation sur les États-Unis sont devenus depuis une réalité politique à la fois inéluctable, et intrinsèquement dangereuse. Les États-Unis sont aujourd’hui à la fois le système de survie et la vache-à-lait d’Israël, sa police d’assurance et son garde-du-corps. Il y a longtemps que les conséquences de cette réalité sont devenues évidentes, mais les conséquences du maintient de cette relation dans le futur deviennent de plus en plus déconcertantes.

Le successeur de Truman, Dwight Eisenhower, a lui préféré la voix de la prudence au sujet d’Israël. Il ne s’est pas retenu de restreindre les ambitions impériales d’Israël qui apparurent au grand jour durant la Crise de Suez en 1956. L’Israël avait envahi l’Égypte en tandem avec, ou encouragé par les puissances coloniales de l’époque au Moyen-Orient, la France et la Grande-Bretagne. Eisenhower était farouchement opposé à cette action lorsqu’elle fut suggérée, et il est très probable qu’elle ait été mise à exécution derrière son dos. La position envers Israël du successeur d’Eisenhower, John Kennedy (JFK) est bien documentée, notamment dans le livre Le jugement dernier de Michael Collins Piper, dans lequel il pointe directement du doigt les Israéliens comme étant ceux qui ont planifié, mis à exécution puis camouflé le dernier jour de JFK en novembre 1963. Mis à part cela, Kennedy avait notamment refusé de soutenir l’ambition israélienne de construire son propre arsenal nucléaire, et pour cela et d’autres raisons gardait une certaine distance avec eux. Cette politique rendit furieux le terroriste sioniste David Ben-Gourion (à l’époque le Premier ministre Israélien ayant succédé à Moshe Sharat), qui après que JFK fut assassiné, réalisa l’union de l’aile dure de son mouvement, qui s’impatientaient de devenir les nouveaux joueurs du grand échiquier moyen-oriental. Finalement, avec l’arrivée de Johnson au pouvoir, ils avaient un ami à la Maison Blanche.

Israël est très redevable au Numéro 35 [35ème Président des États-Unis, NdT] pour cet avantage inestimable d’avoir « l’oreille de Washington », un badge d’entrée à tous les étages de l’administration qu’Israël ne s’est pas privé d’utiliser. Le lobby israélien et ses nombreux substituts n’ont pas perdu de temps à infiltrer l’administration de LBJ à tous les échelons de la hiérarchie, et ont tous bénéficié du traitement de « grand voyageur » aux frais du nouvel ami d’Israël, le Président des États-Unis. Et ces pratiques persistent jusqu’à aujourd’hui. (Pour plus d’informations au sujet des événements et personnes décisifs de cette époque, les lecteurs devraient consulter le livre Souvenez vous de la Liberté de Phillip Nelson ainsi que mon article en deux parties sur le même sujet, ici et là).

Le récent décès de George HW Bush n’a sûrement pas soutiré les larmes de beaucoup de gens d’un certain bord politique et d’un certain point de vue historique, même pour ceux qui ne sont pas portés à penser ou dire du mal d’une personne récemment décédée. Malgré cela, selon Alison Weir, l’auteur de Si les Américains savaient, Bush senior mérite des éloges pour au moins une décision, qui a presque certainement contribué à l’échec de sa tentative de réélection en 1992 au poste de Président, et qui a par définition altéré le cours de l’Histoire. (« C’est les Sionistes, idiot ! »).

Dans son récapitulatif, Weir explique qu’en bloquant un montant de 10 milliards de dollars de prêts garantis en 1991 à Israël à cause de la question de constructions illégales dans les territoires occupés de Palestine, Bush senior remporta une bataille mais perdit la guerre, dans ce qui fut une leçon que présidents et politiciens de tous bords politiques ont appris depuis. Bush dit à Israël que les États-Unis ne débloqueraient pas dix milliards de prêts garantis jusqu’à ce qu’Israël cesse ses constructions sauvages en Cisjordanie et à Gaza, qui sont évidemment illégales au regard du droit international. Au cours de son effort de trouver une solution pacifique à la question insoluble des territoires occupés et à la signature d’un accord de paix global entre Israël et les Palestiniens, Bush senior déclara publiquement :

Je pense que le peuple américain me soutiendra fortement sur cette question. Je vais me battre pour car je pense que c’est ce que veut le peuple américain, et je fais absolument tout ce qui est en mon pouvoir pour assister ces membres du Congrès américain qui envisagent la possibilité de paix future sous un angle innovant.

Ce sont certes des bons sentiments, mais Bush était complètement naïf s’il pensait qu’une telle position politique l’amènerait à un second mandat présidentiel. Or il semble que ni le Congrès, acheté par le Lobby justement pour faire face à ce genre de situation, ni le peuple américain si souvent glorifié, n’aient « envisagé la possibilité de paix future sous un angle innovant ». Soit ils étaient à cours de compassion pour Israël, ou alors avaient des problèmes plus importants dans leur vie, ou ne se donnèrent pas la peine d’aller voter. On se doute que cela n’a pas beaucoup changé depuis. Bien sûr le lobby israélien, le tout-puissant Comité des affaires publiques américano-israéliennes (AIPAC), toujours à deux doigts de l’indignation, pris ombrage, comme prévu, de la manœuvre de Bush. Celui-ci a surestimé le Congrès et les gens qu’il représente, et ce faisant, sous-estimant le pouvoir du Lobby, il enfonça le clou dans le cercueil de sa carrière de président.

Il est intéressant de rappeler que le Premier ministre israélien de l’époque était l’ex-terroriste et chef du Mossad Yitzhak Shamir, un homme qui, comme nombre de dirigeants israéliens pensait que son pays était au-dessus des lois et exempt de toute critique. Il alla jusqu’à déclarer à l’époque qu’Israël avait le droit de s’immiscer dans les affaires des autres pays, une réalité qui fut largement illustrée dans deux documentaires récents diffusés sur al-Jazeera, dont l’un invoque justement les résultats des élections de 1992 comme preuve de cette interférence israélienne. L’auto-satisfaction pétrie de rectitude morale et la tendance à se croire tout permis est telle que Shamir n’y voyait même pas de sujet à débat : « Nous sommes loin d’avoir quelque conflit moral que ce soit au sujet de notre combat nationaliste. Nous sommes animés par ce commandement de la Torah, dont la moralité dépasse de loin n’importe quel texte de loi dans le monde : ‘Tu les extermineras jusqu’au dernier homme’. »

Quand Shamir fut éjecté du pouvoir lui-même en juillet 1992, son successeur Yitzhak Rabin promit de fournir les gages pour obtenir les prêts garantis, après quoi Bush apposa sa signature au bas des accords. Non seulement les ambitions de réélection de Bush capotèrent, mais Israël, passé sous la direction de Netanyahu en 1996, revint sur ses engagements dans cet accord sur les prêts garantis. Jusqu’à aujourd’hui, les constructions sauvages dans les Territoires occupés continuent. (Rabin, qu’il ait ou pas été sincère lors de la signature de ces accords, fut assassiné en 1995).

Cela dit, pour certains observateurs, on voit apparaitre des signes que cette façade complexe, construite avec tant d’assiduité, commence à se craqueler. Lors d’une récente entrevue pour la chaîne Russia Today avec Rick Sanchez, Chris Hedges a discuté du movement BDS (Boycotter, Désinvestir et Sanctionner), dont l’objectif est entre autres d’appliquer une pression économique et diplomatique sur Israël et de mettre en lumière les conditions de vie pitoyables des Palestiniens qui vivent de facto dans un système de ségrégation raciale. Ce système est imposé par Israël de façon unilatérale, en violation totale du droit international et des principes démocratiques, en plus d’une indifférence absolue aux droits élémentaires des Palestiniens tels l’égalité, la sécurité, la justice, la paix et la liberté. En effet on pourrait arguer que la victoire en terme de relations publiques d’Israël est d’avoir réussi à convaincre le reste du monde d’entériner et d’adopter le même niveau d’indifférence à la situation des Palestiniens.

Pour autant, Hedges explique qu’Israël est en train de prendre peur et se sent acculé, comme le montre la diffusion de la législation anti-BDS aux États-Unis. Cette campagne du lobby israélien et de ses nombreux appuis aux États-Unis aux niveaux municipal, provincial et fédéral est l’offensive de la dernière chance pour protéger l’image publique d’Israël en faisant dérailler le mouvement et en discréditant les gens et les organisations derrière ce mouvement. Avec plusieurs États américains qui ont inclus dans leurs lois des provisions anti-BDS (et dont l’attachement à ce combat frise la ferveur du djihadiste), le Premier amendement de la constitution américaine est menacé d’une manière qui doit faire se retourner dans leur tombe les Pères fondateurs de la nation, en tout cas ceux qui y sont attachés. En parlant des Pères fondateurs de la nation, on peut se demander ce que leur « Parrain », George Washington, penserait de l’enchevêtrement de son pays avec Israël, étant donné son point de vue, largement documenté, sur les dangers inhérents à un tel rapprochement.

De plus, Israël tente à l’échelle mondiale de redéfinir le terme d’anti-sémitisme, un terme rebattu mais toutefois très utile pour le servir à la fois comme champ de force impénétrable contre toute critique et de rayon paralysant utilisé pour dénigrer, discréditer et même détruire ceux qui osent critiquer ses actes. Mais selon l’analyse de Hedges, Israël « ne peut plus contrôler la direction de la fable qu’il a inventée ni même cacher la brutalité de son système de discrimination raciale ».

Pour une étude approfondie de certaines de ces « fables sophistiquées » (ou mythes), l’ouvrage d’Ilan Pappe Dix mythes à propos d’Israël est le plus utile pour identifier les mythes fondateurs (que Pappe appelle des escroqueries), comment ils ont été créés, qui les contrôle, quelles seront les conséquences si nous continuons de vivre dans un monde régi par des fables, et de savoir si nous sommes disposés à les accepter, ou si nous sommes forcés de les accepter. On pourrait demander : Comment ces fables menacent-elles l’ordre géopolitique ? (surtout lorsque les postulats longuement préparés qui leur servent de fondation sont en complète opposition avec les faits sur le terrain) L’Irak ? La Libye ? La Syrie ? Le Yémen ? Voilà la brutale réalité du terrain !

Les réponses à toutes ces questions vont au-delà du cadre de cet article, mais il convient de les garder à l’esprit dans leur forme rhétorique au fur et à mesure que nous avançons. Pappe identifie plusieurs escroqueries qui ont permis de soutenir l’image et la crédibilité de l’État d’Israël comme nation « morale », à savoir : qu’il a toutes les raisons d’exister ; qu’il a le droit de se défendre ; que sa cause est juste ; que les autres nations veulent le détruire ; et que contrairement aux autres nations, il n’est pas soumis au droit international.

On pourrait dire que les Israéliens ont leur propre « institution particulière » vis-à-vis des Palestiniens, une sorte d’esclavage des temps modernes au sein duquel les droits humains, sociaux, économiques et autres sont régulièrement foulés du pied par un État d’apartheid envers des gens qu’il continue de déposséder de leurs terres pour s’installer dessus, et qu’il continue de piller, d’accaparer, de confisquer, de voler ou de détruire les possessions sans aucune retenue. [Dans le cours en vidéo en pièce jointe, Pappe parle de son livre].

Même si Israël a réussi à convaincre le monde de ce mensonge, l’Iran n’est pas sa plus grande menace stratégique, c’est plutôt les efforts concertés, aussi bienvenus que nécessaires, de nombreux groupes, nations et individus (y compris des personnalités israéliennes) pour dénoncer et contenir l’attitude de voyou dont fait preuve Israël. Israël est au courant de ce fait. Le corollaire de ceci est que la peur existentielle d’Israël réside dans la diminution du soutien dont il jouit actuellement auprès de l’électorat américain, juif ou pas, même si bien malin serait un commentateur politique qui serait capable de prédire comment cela va évoluer, et sur quelle durée.

Les efforts herculéens et continus d’Israël pour réduire ces groupes et individus au silence n’en sont pas les seules preuves ; Israël a infiltré et sape le système juridique et les processus politiques de nations entières dans le but de rendre illégal et punissable par la loi le simple fait de critiquer Israël. Si la phrase « Pour savoir qui vous dirige vraiment il suffit de regarder ceux que vous ne pouvez pas critiquer », habituellement attribuée à Voltaire est vraie, il est difficile de penser à n’importe quelle autre nation qui remplit ces critères. Le récent incident où une orthophoniste scolaire au Texas a été renvoyée parce qu’elle a refusé de signer une promesse selon laquelle elle ne soutiendrait jamais le mouvement BDS est seulement un des plus récents exemples de cet effort draconien de museler toute tentative de débat sur Israël.

Pour ceux qui douteraient encore du pouvoir coercitif qu’Israël et son réseau de soutiens institutionnels, organisationnels et politiques détiennent en Occident (surtout en Grande-Bretagne et aux États-Unis), les deux documentaires produits par la chaîne d’information Qatari al-Jazeera mentionnés plus haut devraient dissiper toute incertitude. Comme le montrent ces films, cet allié de l’Occident de plus en plus incontrôlable ne rencontre presque aucune opposition à ses tendances hégémoniques au Moyen-Orient. Israël refuse de reconnaitre, et encore moins de respecter les frontières définies par le droit international. Ce faisant, Israël défie les principes fondamentaux qui unissent les communautés nationales, et la souveraineté de nations indépendantes, et place la sécurité mondiale, la paix et la stabilité dans une situation encore plus grand dangereuse. Pour faire court, au plus les Israéliens repoussent ces frontières, au plus ils se sentiront investis d’un droit divin de procéder ainsi, et au plus nous serons obligés de les laisser faire. C’est une des plus importantes leçons tirées de ces deux films, le premier traitant de la Grande-Bretagne, le second des États-Unis.

D’un point de vue géopolitique, il s’agit plus d’un cauchemar en cours que d’un accident à venir. À moins qu’on attende tous une autre guerre mondiale, il est temps de faire rentrer Israël dans le rang et de définir les responsabilités. Si cela vous semble alarmiste, imaginez le scénario suivant.

Au début de l’année, l’ancien directeur de cabinet de Colin Powell, Lawrence Wilkerson a déclaré de façon catégorique qu’Israël est en train de faire basculer les États-Unis dans une guerre avec l’Iran, qui a le potentiel de détruire ce qui reste du Moyen-Orient et de démarrer une troisième guerre mondiale. Wilkerson dit que les preuves sont formelles : Israël cherche « une confrontation majeure avec les différentes puissances qui lui résistent, qui engloutira l’Amérique et mettra fin à l’expérience qu’est Israël, et provoquera des dommages irréparables à l’empire que l’Amérique est devenue ».

Wilkerson pointe directement du doigt Netanyahu, dont les attaques sur mesure de la République islamique d’Iran sont aussi vociférantes que provocatrices. Ce dernier pleurniche, en mode princesse Cassandre, avec une régularité monotone et à qui veut l’entendre que a.) l’Iran est la plus grande menace que l’État juif n’ait jamais affrontée et qui menace la stabilité du Moyen-Orient, et b.) attise constamment les flammes des l’anti-sémitisme comme s’il en détenait le monopole. Wilkerson balaie ces accusations qui servent les intérêts d’Israël en ayant recourt à la simple logique (un outil de discussion que beaucoup de défenseurs d’Israël semblent ne pas connaitre).

Comme Wilkerson l’a dit au moment de la discussion, « cet anti-sémitisme supposé est bien sûr presque toujours l’arme de choix des politiciens israéliens lorsqu’ils se trouvent en difficulté, et qu’ils jettent dans ce cas précis à la figure du pays dont la population juive, la plus importante au Moyen-Orient après la Turquie et Israël, vit en Iran une existence paisible ». Comme beaucoup d’entre nous, ce que semble suggérer Wilkerson est que le « cachet » de l’accusation d’anti-sémitisme a perdu de son lustre d’antan. C’est en partie pour cela qu’Israël est en train de perdre le contrôle de la discussion.

La revanche des « mossers » ? [Juifs qui font appel aux autorités non-juives, NdT].
Même s’ils existent de façon substantielle, le statut et l’influence d’Israël sont tels que ces forces de résistance ont du mal à tenir ce monstre en respect. Pour démontrer cela, référons-nous au récent article de David Sheen sur Lobelog, au titre qui ne souffre aucune ambiguïté : « Israël écrase la résistance à domicile et à l’étranger ». Selon Sheen, la gauche israélienne est en débandade, reléguée au niveau d’une force politique négligeable.

Ce qui est intéressant dans ce commentaire est que si elle est évidente aux yeux des gens un peu éveillés, la situation ne paraît pas recevoir beaucoup d’attention dans le débat politique, et particulièrement dans les médias de grande écoute. Cela est peut-être, ou pas, une coïncidence, puisque la gauche occidentale a peu à peu été émasculée et marginalisée depuis un certain temps déjà. En dépit de l’état de délabrement de la gauche israélienne, cela pourrait être une réflexion d’une plus grande réalité politico-économique.

De plus, étant donné les preuves multiples du soutient sans faille que portent les médias occidentaux à Israël, on ne peut pas s’attendre à ce que cela change de si tôt. Sheen explique par ailleurs que la gauche israélienne ne représente qu’une « infime fraction » de la population d’Israël, avec « des chiffres qui ne font que diminuer depuis le début du 21ème siècle ». Selon le scénario déprimant et de mauvais augure décrit par Sheen, empli d’ironie tragique de l’Histoire, le théâtre des opérations de la politique israélienne serait le suivant :

Aucune alliance de partis progressistes ne peut apaiser la coalition de faucons israéliens au pouvoir. Aucun journal libéral ne peut faire s’écarter le grand public des magazines à sensation qui soutiennent Netanyahu, et ne peut que pousser ses concurrents plus à droite de l’échiquier politique. Et aucun groupe de militants n’a réussi à gagner le cœur et les esprits des jeunes Juifs, qui sont soumis à une dose croissante de lavage de cerveaux dédié à la cause sioniste. Les parlementaires israéliens incitent ouvertement et avec régularité à la violence envers les figures de la gauche israélienne, dans une tentative de redorer leur image auprès des électeurs israéliens. Même sans cette dernière mesure, la société israélienne opère une purge de plus en plus profonde de sa frange libérale de tout position d’influence, comme peuvent en témoigner les Israéliens de gauche qui ont perdu leur emploi ces dernières années.

Pour ceux d’entre nous qui défendent depuis longtemps l’idée que tout espoir de « réhabilitation » pour Israël réside principalement dans les efforts de son aile gauche libérale progressiste en Israël et aux États-Unis pour contrer puis rejeter les tenants du Sionisme, les conclusions de Sheen ont tout pour nous rendre pessimistes. Avec un Sionisme comme idéologie triomphante en Israël, complètement à l’opposé de ce qui ressemble de près ou de loin au libéralisme, la vrai bataille doit être menée par une masse critique de Juifs du quotidien des quatre coins du monde qui adhèrent véritablement aux valeurs libérales, et/ou se sentent mal à l’aise avec le fait qu’Israël prétende agir en leur nom et dans leur intérêt. On peut imaginer qu’il existe même un certain nombre de Juifs d’un conservatisme plus nuancé qui pourrait se trouver en accord avec certains principes libéraux et voir d’un autre œil la cause de justice, d’égalité et de paix pour les Palestiniens si seulement ils voulaient bien se ré-informer sur la triste réalité des faits sur le terrain. Dans les deux cas, le processus sera de longue haleine.

Mais comme le signale Sheen, ces chiffres déclinent, et pas seulement en Israël. Selon lui, le tableau est encore plus sinistre aux États-Unis. Il postule que les Juifs américains, la seconde plus grande communauté juive au monde (et perçue comme plus libérale que les Israéliens) pourrait faire naître cette « masse critique » nécessaire à la bataille. Mais cependant, il note qu’il est futile d’espérer voir les militants israéliens abandonner leurs incessantes requêtes de soutient à leurs frères américains :

Malheureusement pour la gauche israélienne en état de siège, il semblerait que le gouvernement israélien a une avance considérable sur elle, ayant pris l’initiative de porter le conflit aux États-Unis également. L’objectif semble être le suivant : écraser aux États-Unis toute opposition à Israël et à ceux qui voudraient créer sur le modèle israélien leur propre État sur une définition ethnique.

Dans un éditorial qu’il a adressé à ses concitoyens israéliens en 2016, le journaliste Jonathan Ofir a également décrit ce sentiment de la façon suivante :

Mon espoir de voir bientôt un changement venant de nous, les Israéliens, a malheureusement décliné ces dernières années, et je me trouve contraint de placer mes espoirs dans la communauté internationale, dont nous avons grandement besoin, pas pour son argent, ses armes ou pour sa ‘compréhension’, mais plutôt pour son intervention dans ce que nous sommes incapables, voire pas intéressés de résoudre nous-mêmes. Mes agissements ici sont extrêmement impopulaires au sein de la communauté israélienne et juive. C’est l’essence du terme ‘mosser’, celui qui ‘balance la nation juive’ aux Gentils. Soit, il va falloir vous y faire ! Il y a des problèmes plus pressants à résoudre.

Tout observateur de géopolitique un tant soit peu objectif, et tout puriste sur la question de la « réalité » ne peut nier l’existence du « spécimen » suivant. Cette « réalité » abordée précédemment, qu’on ne peut résumer en deux mots, porte en elle les germes d’événements qui concernent le monde entier : à savoir qu’Israël, associé à certains individus, institutions et autres cinquièmes colonnes infiltrés aux États-Unis (qu’ils soient américains, israéliens, ou les deux mais tous très bien disposés à l’égard d’Israël), a exercé une influence disproportionnée dans la définition de la politique étrangère américaine, tout en manipulant et en affaiblissant le système démocratique américain et son processus électoral de façon généralisée. C’est ce qu’on appelle se croire tout permis de façon un peu téméraire.

En résumé : Israël menace l’équilibre et la sécurité du monde d’une façon sans précédent historique et tout à fait imprévisible. En un mot, Israël ne respecte qu’Israël !

Pour ma part, je ne peux penser à aucun autre épisode de l’Histoire où la puissance hégémonique du moment abandonne les rênes du pouvoir au profit d’une nation plus petite, et ce faisant, place son destin, et, serions-nous tenter d’ajouter, celui d’autres nations y compris celles dont elle prétend être alliée, dans les mains d’une cabale dont la première allégeance va, à part à elle-même et ses semblables, à la nation qui est le bénéficiaire direct de cette accumulation de pouvoir. Il s’agit peut-être de la plus grande aberration géopolitique de l’histoire de l’Humanité, en d’autres termes une largesse octroyée de façon inconditionnelle et irréfléchie par une nation à une autre, bien que menaçant potentiellement sa propre existence. On est vraiment en territoire inconnu. Ce qui n’est pas évident pour la majorité est que ce faisant, les États-Unis ont plongé l’ordre mondial tel que nous le connaissons dans une situation chaotique. Qui sait, peut-être était-ce l’objectif depuis le début ? !

À l’époque, lorsque George Bush affrontait Bill Clinton en 1992, ce dernier réalisa assez rapidement que « c’est l’économie, idiot ! » qui primait sur tout. L’Histoire lui a donné raison dans un sens. Mais Bush lui a réalisé, trop tard, que c’était les Sionistes en fait.

Et c’est toujours le cas.

Greg Maybury

Greg Maybury est un auteur, blogger basé à Perth en Australie. Un ancien professeur de lycée avec un fort intérêt pour l’Histoire, la politique, la culture et la société américaine, Greg contribue régulièrement à plusieurs sites de ré-information, dont Dandelion Salad. Son blog est accessible sur www.poxamerikana.com

Article original paru sur Dandelion Salad

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