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Témoignage de Paul Moreira sur les Gilets Jaunes

J’ai passé mon samedi avec les Gilets Jaunes dans les rues. Avenue de Friedland, j’ai parlé avec des ouvriers de Picardie ou de Moselle. Avec une sincérité désarmante, ils racontaient leur pauvreté, celle de leurs « anciens », l’intérim, la détresse, l’instabilité…

Ils disaient leur colère de voir les super-riches payer si peu d’impôts. Ils veulent plus de partage, de redistribution. Ou juste un boulot. Une femme de Forbach : « Toutes les usines ont fermé dans notre coin. Heureusement, je fais femme de ménage en Allemagne. »

Et dans un même souffle, sans haine, avec une sorte de fatalité, ils lâchaient qu’ils étaient inquiets à cause du pacte de Marrakech qu’ils avaient vu sur internet. Ils ne voulaient plus accueillir d’immigrés. « Y’a plus assez de boulot pour tout le monde ».

Ce désespoir profond peut glisser vers une nouvelle forme de fascisme, le national-populisme. J’en avais déjà trouvé les traces lors de mon enquête sur l’électorat ouvrier du Front National pour Canal Plus.

Le sentiment d’abandon, de révolte. L’impression de ne plus intéresser personne. La haine contre le mépris de Paris. Contre les médias complices. Contre la gauche de gouvernement bien habillée qui ne se soucie que des minorités et plus des ouvriers.

Samedi dernier, j’ai vu des hommes et des femmes aux visages marqués, me vanter les mérites supposés du président brésilien, Bolsonaro, qui aurait promis de baisser son salaire, ou de la présidente croate qui « vit comme tout le monde ».

« Paris brûle », à Bruxelles, Steve Bannon, artisan du triomphe de Trump, partageait une tribune avec Marine Le Pen et il se réjouissait. Il a un projet : nationalisme et dérégulation économique pro-business. C’est à dire le démantèlement des dernières protections sociales.

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