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Le Maroc joue sa dernière carte avec lUE

Le représentant permanent du Maroc auprès de lUnion européenne veut faire croire aux dirigeants européens que Bruxelles sera confrontée à une grosse difficulté si elle venait à appliquer le jugement de la Cour européenne de justice annulant laccord sur la pêche et lagriculture dans le Sahara occidental occupé.
Après la décision du Maroc de suspendre jusquà nouvel ordre toute réunion programmée dans son agenda avec Bruxelles et tout le tapage médiatique, début janvier, autour de lenvoi dune note, le 23 décembre dernier, à lensemble des ministères leur demandant la suspension immédiate de toute participation aux réunions avec lUE, Rabat passe au plan B, en adoptant cette fois un ton plus conciliant et en multipliant des déclarations dans lesquelles il réitère son refus dinterrompre ses relations avec lUnion européenne.
La priorité des priorités du royaume du Maroc est damener lUE à faire barrage au fameux accord agricole et de pêche (avec effet immédiat) qui a été décidé, le 10 décembre 2015, par la Cour européenne de justice (CJUE), sachant que Bruxelles a jusquau 22 février pour faire appel de la décision. Lessentiel dans cette course contre la montre est de le conforter dans sa position de maître du territoire non autonome du Sahara occidental et de ses richesses naturelles.
Cest dans ce cadre que sinscrivent les récentes déclarations de Menouar Alem, chef de la représentation permanente du Maroc auprès de lUE. Dans une interview publiée avant-hier par Jeune Afrique, ce dernier a de nouveau affirmé que son pays nest pas dans une situation de rupture avec lUnion européenne comme cela a pu être dit ici et là. M. Alem a préféré sen tenir au constat, en se demandant comment un tel accord puisse se retrouver un jour annulé. Une question qui, en réalité, suscite une toute autre question, qui reflète linquiétude du voisin de lOuest, qui voit l’étau judiciaire international se resserrer sur lui : le jugement de la Cour européenne de justice, considéré comme une suite de l’avis de la Cour internationale de justice de 1975, aura en effet un impact non seulement sur les autres accords intégrant les zones occupées sahraouies mais aussi sur les négociations générales conduites sous l’égide de l’ONU. Nous ne pouvons pas continuer à négocier des accords si nous navons pas lassurance quils ne seront pas rejetés, soutient le responsable marocain, avant de sen prendre à la décision du 10 décembre, la qualifiant de décision politique. Plus encore, linterviewé sen va même expliquer aux décideurs européens quen cas dapplication de larrêt en question, lUE sera confrontée à une grosse difficulté, celle dêtre en violation du droit international et même du droit communautaire. Menouar Alem ne désespère pas, mais au lieu demprunter le style menaçant, dil y a quelques jours, de Mustapha El-Khalfi, ministre de la Communication et néanmoins porte-parole du gouvernement, il joue la carte de la construction, affirmant que si le Maroc perdait cette bataille, cest tout lédifice de la relation que lon a bâtie avec lUE qui risquerait dêtre ébranlé. Il y aura clairement un impact sur notre relation avec lUnion ainsi quavec ses États membres, précise-t-il encore, en notant plus loin que les responsables européens sont convaincus de la nécessité de trouver rapidement une sortie à cette crise.
Hafida Ameyar
Liberté, 03/02/2016
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