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Médiation au Mali : "A quel titre le Maroc aurait-il dû en être?"

Afrique: Ramtane Lamamra, une diplomatie au four et au moulin
Le ministre algérien des Affaires étrangères s’est confié à l’hebdomadaire Jeune Afrique pour expliquer son action et les logiques qui l’animent. Que ce soit au Maghreb, au Sahel ou ailleurs dans le monde, l’objectif, explique-t-il, est d’œuvrer au règlement des crises et à faciliter, dans un contexte des plus imprévisibles et difficiles, le rapprochement entre les acteurs susceptibles d’être des vecteurs de paix et de stabilité.
Avec un verbe presque laconique bien propre au «politiquement correct» et aux ellipses diplomatiques surtout, le ministre des Affaires étrangères Ramtane Lamamra n’en a pas moins livré, dans un entretien accordé à notre confrère Jeune Afrique – dans sa livraison hebdomadaire du 3 au 9 août – quelques indications sur la position de l’Algérie quant à l’actualité régionale, dominée par la crise au Nord-Mali, le Maroc et son discours officiel discourtois, le crash de l’avion de ligne AH5017, puis sur les autres grands dossiers de l’heure, dont les massacres de l’armée israélienne à Gaza. Présenté comme l’un des meilleurs africanistes de la diplomatie algérienne, pour reprendre l’expression choisie par Jeune Afrique, Ramtane Lamamra s’est montré très enthousiaste sur les résultats du «processus d’Alger» qui a débouché sur «une feuille de route consensuelle» en vue des négociations prévues dans la capitale le 17 août prochain. Dans ce chapitre, « la feuille de route identifie l’Algérie comme le chef de file de la médiation [inter-malienne], aux côtés de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest, l’ONU à travers la Minusma, l’Union africaine, l’Union européenne, l’OCI, ainsi que quatre pays voisins : Burkina Faso, Mauritanie, Niger et Tchad », précise M. Lamamra, avant d’être interrogé sur l’absence du Maroc dans ce processus, bien que le monarque chérifien Mohamed VI ait pris, en mars dernier, son bâton de pèlerin à travers l’Afrique sahélienne et subsaharienne, s’essayant à jouer les médiateurs entre le gouvernement de Bamako, les Touareg et les mouvements islamistes qui se disputent le Nord-Mali, quitte à phagocyter l’effort algérien. Comme réponse, toute simple d’ailleurs : «A quel titre le Maroc aurait-il dû en être ?». Cette même question avait déjà été posée à Abdoulaye Diop, ministre malien des Affaires étrangères, lorsqu’il était à Alger pour représenter son pays à la Conférence interministérielle des non-alignés, en mai dernier, et à laquelle il répondait dans nos colonnes : « Parce que l’Algérie n’en est pas à sa première expérience de médiation. De plus, elle a toujours été aux côtés du Mali. Nous nous souvenons que dans les accords de paix qui ont été signés dans les années 1990 [le pacte national, NDLR], l’Algérie a joué un rôle similaire, où elle a travaillé avec les différents groupes armés pour aider à trouver une solution. Aujourd’hui, nous pensons que les efforts de l’Algérie s’inscrivent en droite ligne de ce soutien constant dont nous avons toujours bénéficié. » Mais le ministre des Affaires étrangères prend le plus grand soin d’ajouter : « Pourquoi entretenir le cliché selon lequel l’Algérie s’emploierait à isoler le Maroc ? », en insistant sur le fait qu’il n’est jamais dans la nature de l’Algérie d’exacerber tout malentendu avec le voisin marocain, d’autant plus qu’il met un point d’honneur à qualifier son homologue, Salah Eddine Mezouar, à qui nous devons un propos « grossier » alimenté par la question du Sahara occidental, « de collègue et de frère » qu’il a « appris récemment à connaître ».
Un Mali «monopolisant»
Au-delà de la «crise» de l’Azawad, le Mali a de nouveau fait parler de lui lorsqu’un avion de ligne, affrété par Air Algérie auprès de la compagnie espagnole Swiftair, qui décollait de Ouagadougou à destination d’Alger, ne finira jamais son itinéraire, s’écrasant à mi-parcours sur le sol malien avec à son bord 116 passagers, parmi lesquels six Algériens, tous décédés. La première localisation de l’avion au moment du crash avait été donnée par un groupe armé malien ; ce que M. Lamamra corrobore : «Sans rentrer dans les détails, je confirme qu’un mouvement rebelle malien nous a communiqué la première information crédible sur la localisation de l’épave, que nous avons partagée avec les capitales concernées, ainsi qu’avec la Minusma. Pourtant, l’attention était rivée sur «un certain effacement» de l’Algérie dans l’enquête procédurale qui a suivi le sinistre, qui a particulièrement fait les gorges chaudes de la classe politique et une partie de l’opinion nationale. «Face à une situation exceptionnelle, aucune gestion ne peut faire l’unanimité ni décrocher le label de la perfection », répond M. Lamamra, conscient que « la gestion de crise est toujours accompagnée de polémiques qui ne s’estompent qu’à l’issue des investigations».
Tous ces événements intervenaient au moment où le Mali signait un accord de coopération militaire avec la France ; et à Jeune Afrique de demander au ministre des Affaires étrangères si cela avait, d’une manière ou d’une autre, froissé l’Algérie, vu son hostilité de principe contre toute présence militaire dans la région. «L’Algérie s’en tient à sa position de principe sur la présence des forces militaires étrangères. Mais elle respecte les décisions souveraines des autres pays», répond-il. A ce propos, il est une nouvelle fois interpellé sur l’éventualité de l’installation d’une base militaire française à Tessalit, au nord-est du Mali, mais frontalière du Sud algérien. «La presse a émis cette hypothèse, mais nous avons été assurés qu’il n’en sera rien», a fait part M. Lamamra.
Il se garde néanmoins de révéler… par qui l’Algérie a-t-elle été assurée qu’il n’y aura pas de base militaire française à ses frontières ! Enfin, l’interview accordée par le ministre des Affaires étrangères Ramtane Lamamra à Jeune Afrique était une occasion de revenir sur le «drame» de Gaza – qu’elle continue de vivre jusqu’à aujourd’hui – en affirmant que l’Algérie suit sans discontinuer la situation en Palestine, saluant l’effort des représentations diplomatiques algériennes dans le rapatriement de nos ressortissants dans la région ou encore dans les opérations d’aide ou d’acheminement des vivres à la population gazaouie. En conclusion, une question sur le chef de l’Etat Bouteflika à propos duquel M. Lamamra répond : «[Il va] fort bien, Dieu merci. Le président assume pleinement ses responsabilités […].»
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